Le doctorat est une voie semée d’embûches que peu de personnes sont prêtes à traverser.
Surtout si l’on tient compte des difficultés d’employabilité des doctorants une fois qu’ils quittent le milieu académique, la précarité à laquelle ils font face tout au long de leurs études et le peu de soutien qu’ils obtiennent notamment au niveau de leur santé mentale.
Malgré cela, le rôle essentiel des chercheurs dans notre société, que ce soit au niveau scientifique, sociologique ou culturel, est indéniable.
La réalité de chercheuse en formation, Erika Dupont la connaît bien, pour avoir elle-même vécu un parcours doctoral assez éprouvant. Ses apprentissages de vie l’ont menée à créer une agence pour accompagner les jeunes chercheurs afin de leur éviter de vivre leur études supérieures dans les mêmes conditions déplorables.
Aujourd’hui, elle nous partage ce qui se cache derrière les portes des universités et l’impact qu’a eu son parcours doctoral sur sa vie professionnelle.
Dans cet épisode, on discute notamment de :
- Ce qui a poussé Erika à se lancer dans un doctorat en histoire de l’art, un domaine choisi un peu “par défaut”
- Une réflexion sur la gratuité des études universitaires
- Les impacts réels que le doctorat a eu sur la santé d’Erika et comment ça aurait pu être évité
- Qu’est-ce qui l’a poussée à quand même aller au bout de sa thèse et comment elle a intégré l’entrepreneuriat dans tout ça
- Quelques conseils d’Erika pour celleux qui souhaiteraient se lancer dans l’aventure doctorale
À écouter également : Ep. 113 Le burnout et les femmes avec Tessadit Ouiddir
Pour aller plus loin : Le doctorat : pour quoi, pour qui, comment? et Le doctorat, est-ce ça vaut le coup?
À propos de Erika Dupont
Erika est docteure en histoire de l’art contemporain. Comme des milliers de chercheurs français, elle s’est lancée en doctorat sans être bien informée sur les enjeux de la recherche professionnelle et sans être orientée vers les actions indispensables pour faire un parcours stratégique en recherche. Si elle s’en est bien sortie au regard de son parcours professionnel, son CV dissimule deux hospitalisations dans un état grave en dernière année de thèse, dont elle gardera les séquelles toute sa vie. Deux ans après l’obtention de son doctorat, elle décide de créer l’Agence conseil aux jeunes chercheurs pour former et orienter les jeunes chercheurs comme il se doit et leur éviter les pièges les plus courants. Depuis trois ans, elle a publié des centaines de ressources en ligne accessibles gratuitement, et propose des programmes d’accompagnement sur les étapes clés de l’inscription et de la poursuite en doctorat. Ses programmes sont destinés aux jeunes chercheurs en quête de soutien et de conseils de chercheurs expérimentés, pour avancer sereinement dans la construction d’un parcours d’excellence.
Dans cette entrevue, Erika lève le voile sur une réalité trop peu connue concernant le parcours doctoral et nous invite à réfléchir sur la valeur de cette aventure.
Que vous soyez actuellement doctorante ou simplement intéressée par le monde académique, cet épisode offre des perspectives précieuses sur le chemin souvent complexe mais enrichissant de la recherche.
Mentionné dans cet épisode :
- Le lien pour retrouver Erika Dupont sur Instagram et LinkedIn
- Retrouve-la aussi sur sa chaîne YouTube et son site internet pour en savoir plus et découvrir ses programmes.
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Transcription de l’épisode 170
Ep. 170 Revaloriser l’aventure doctorale avec Erika Dupont
Tatiana [00:00:00]:
Vous écoutez l’Ambition au Féminin épisode 170 et aujourd’hui je reçois Erika Dupont qui lève les voiles sur l’aventure doctorale et qui nous parle de comment la valoriser.
Tatiana [00:00:12]:
Mon nom est Tatiana St-Louis et j’anime l’Ambition au Féminin, un podcast pour toutes les femmes pleines de vision, de talent et de drive qui désirent redéfinir le succès selon LEURS termes et LEURS conditions. Chaque semaine, j’explore, seule ou en présence d’invités, les thèmes entourant la réussite professionnelle et personnelle. Mindset, productivité, leadership, branding personnel… C’est LE rendez-vous pour réfléchir à la façon dont TU veux vivre ton plein potentiel et laisser ton empreinte dans le monde.
Tatiana [00:00:41]:
Salut les ambitieuses, j’espère que vous allez bien! Moi ça va super bien parce que dans quelques jours, je quitte pour Milan et ensuite Paris où je vais aller rencontrer de belles personnes dont mes clientes du mastermind, ma coach et aussi des amies et entrepreneuses qui vivent de l’autre côté de l’Atlantique. Donc j’ai super hâte, mais je voulais quand même vous laisser avec des beaux épisodes à vous mettre dans l’oreille et l’un de ceux-ci, c’est une entrevue que j’ai absolument adoré conduire et c’est avec Erika Dupont, on a eu des longs va et vient pour trouver cette date et j’étais très heureuse de finalement pouvoir discuter avec elle parce que je la suis religieusement sur LinkedIn et j’adore son contenu surtout pour moi qui a un… Comment dire? Une affinité avec le milieu académique. J’ai été… Bon, pendant longtemps j’ai cru que j’allais faire un doctorat finalement j’avais abandonné cette voie quand j’ai terminé ma maîtrise, ça fait partie de mes histoires forts, de comment je suis rentrée sur le marché du travail et est devenue entrepreneure. Mais aussi j’ai travaillé dans les communications et le marketing pour des institutions d’études supérieures.
Tatiana [00:02:16]:
J’ai travaillé à valoriser le travail des étudiants aux études supérieures, des doctorants aussi. Donc, c’est quelque chose qui est très près de mon cœur puisque bon, je suis à la fois investie personnellement dans ça, mais j’ai un grand respect pour tout ce qui est le travail, le dur labeur de faire avancer les connaissances, surtout dans des milieux qui ne sont pas nécessairement valorisés dans le marché du travail comme les sciences humaines, les lettres, les arts… Et c’est pour ça que j’ai tout de suite accroché avec la mission de Erika Dupont, qui elle est docteure en histoire de l’art contemporain, et comme des milliers de chercheurs français, elle s’est lancée en doctorat sans être bien informée sur les enjeux de la recherche professionnelle et sans être orientée vers les actions indispensables pour faire un parcours stratégique en recherche. Si elle s’en est bien sortie au regard de son parcours professionnel, son CV dissimule deux hospitalisations dans un état grave en dernière année de thèse, dont elle gardera les séquelles toute sa vie. Et deux ans après l’obtention de son doctorat, elle décide de créer l’agence Conseil aux Jeunes Chercheurs pour former et orienter les jeunes chercheurs comme il se doit et leur éviter les pièges les plus courants. Depuis trois ans donc elle a publié des centaines de ressources en ligne accessibles gratuitement et propose des programmes d’accompagnement sur les étapes clés de l’inscription et de la poursuite en doctorat, ces programmes sont destinés aux jeunes chercheurs en quête de soutien et de conseils de chercheurs expérimentés pour avancer sereinement dans la construction d’un parcours d’excellence. Donc bon, vous avez compris, c’est quelque chose qui, je pense, est très très très utile parce que moi, mon expérience personnelle a été que à la sortie de la maîtrise, quand je suis rentrée sur le marché du travail, j’avais bifurqué parce que j’avais peur de ne pas savoir valoriser mes études supérieures et c’est effectivement un enjeu que plusieurs aussi rencontrent. Ça, c’est bon, ça, c’est plus le post-doctorat, Erika va nous parler davantage du doctorat.
Tatiana [00:04:26]:
Mais c’est sûr qu’aussi, l’idée de voir cette étape de vie comme quelque chose de stratégique, d’y penser stratégiquement, c’est quelque chose qui m’aurait probablement aidée au moment où j’ai pris la décision de quitter l’école, parce que à quelque part, j’adore la recherche aussi, tu sais, je pense que vous le voyez, je crée énormément de contenus, j’adore réfléchir, faire des entrevues et tout ça et je pense qu’il y a beaucoup de personnes aussi dans mon entourage qui ont ce type de passion, mais qui malheureusement n’ont pas trouvé leur compte dans l’institution académique. Et avec Erika durant cette entrevue, on va parler autant de son expérience, de sa vision qu’elle a pour son entreprise, pour son agence d’accompagnement, et aussi des opportunités qu’il y a pour les personnes qui décident de continuer au doctorat, mais aussi les dangers ou les choses auxquelles faire attention quand on est des personnes passionnées, quand on est des personnes qui veulent se dédier à notre domaine d’expertise, mais aussi sans oublier qu’on est aussi… On a besoin de manger, on a besoin de dormir, on a besoin de se reposer. On peut pas faire ça au détriment de notre santé. Donc je ne veux pas prendre plus de temps, je veux absolument que vous entendiez cette entrevue. Que vous soyez intéressé au doctorat ou non, je pense que ça nous permet d’ouvrir les horizons aussi sur la place de l’éducation académique de nos jours et aussi comment l’entrepreneuriat soutient souvent ces aventures-là. Je vous laisse avec Erika.
Tatiana [00:06:11]:
Bonjour Erika, je suis contente de te rencontrer. Merci d’avoir accepté l’invitation de venir sur l’Ambition au Féminin!
Erika Dupont [00:06:19]:
Merci à toi Tatiana vraiment. Merci beaucoup et bonjour.
Tatiana [00:06:23]:
Oui! Je suis vraiment heureuse d’avoir cette conversation. Ça fait longtemps que je te suis, je trouve que tu es très active sur LinkedIn, je pense que c’est ta plateforme probablement de prédilection et j’ai toujours vraiment un intérêt à lire ce que tu vas amener comme perspective parce que c’est rare, je trouve, qu’on va lire ta perspective sur le milieu de la recherche, le milieu académique, le milieu doctoral et surtout des personnes qui vont vraiment avoir comme focus d’aider, tu sais, ces personnes-là, cette partie de la population. Donc avant de commencer, je fais toujours ma petite question brise-glace et j’aimerais te poser la question : qu’est-ce que tu voulais faire quand tu étais petite?
Erika Dupont [00:07:09]:
Je voulais être vétérinaire.
Tatiana [00:07:13]:
Ah ouais, waouh.
Erika Dupont [00:07:14]:
Je voulais être vétérinaire jusqu’à l’année du bac. Tout était tracé pour ça. J’avais fait toutes les portes ouvertes, je connaissais toutes les écoles, j’avais fait tout ce qu’il fallait. J’étais dans un parcours scientifique au lycée et pendant l’année de première et terminale, il y a eu un gros souci dans ma famille, mes parents et ma sœur ont été en conflit très gravement et ma sœur a fait un procès contre mes parents et tout a un peu éclaté, explosé en fait à ce moment-là et je me suis rendu compte que j’avais pas les… Je cherchais des réponses en fait plus existentielles, tu vois, j’ai fait une petite crise existentielle à l’époque, et du coup je me suis tout à coup vraiment tournée vers la philosophie, les lettres, alors que j’avais toujours été plus portée sur les mathématiques et la chimie et en fait j’ai fait un gros shift à ce moment-là et… J’avais toujours dessiné, je dessinais beaucoup dans ma chambre toute seule et je me suis intéressée aux écoles d’art à ce moment-là. Et finalement, j’ai essayé d’intégrer une école d’arts appliqués après le bac. Mais on m’a dit non parce que je n’avais pas un parcours du tout artistique, je n’avais même pas pris d’options artistiques au lycée ou quoi que ce soit. Moi, je voulais faire vétérinaire.
Erika Dupont [00:08:27]:
Et donc voilà, ils m’ont conseillé de faire une année d’histoire de l’art à la fac en attendant et de repostuler à l’école d’art l’année suivante. Ce que j’ai fait et entre temps il y a eu… Il s’est passé plein de choses qui font que je suis restée à la fac, notamment parce que je devais financer moi-même mes études et que l’école d’arts appliqués ne m’aurait pas permis de travailler en même temps en fait, c’était un BTS. Donc voilà, l’université me permettait de travailler, de financer mes études supérieures seule et donc c’est ce que j’ai fait et je suis restée dans le parcours histoire de l’art jusqu’au bout, donc jusqu’au doctorat.
Tatiana [00:09:04]:
On a vraiment un parcours semblable. Moi, je voulais entrer en musique et je n’avais pas non plus de… J’avais commencé à jouer du violon quand j’avais seulement quinze ans. Donc, parce que j’étais capable de travailler pour financer mes cours justement de violon, puis on m’a dit de réappliquer l’année d’après et finalement je suis rentrée en littérature et j’ai juste suivi cette voie jusqu’à la maîtrise dans mon cas à moi, mais je pense que cette notion aussi de pouvoir être autonome financièrement, pour moi aussi, c’était quelque chose qui était vraiment important parce que je n’avais pas nécessairement des parents qui pouvaient couvrir les bourses, puis… Bref. Ici, au Québec, on n’avait pas… J’avais pas accès non plus aux bourses du gouvernement, donc il y a vraiment cet enjeu de mêler à la fois le côté académique, mais savoir que c’est un lieu privilégié aussi dans lequel on a besoin d’avoir, soit des fonds qui ont déjà été mis de côté, ou d’être capable de travailler.
Erika Dupont [00:10:07]:
Exactement. Il y a une petite hypocrisie, je pense là-dessus en France, c’est qu’on promeut des études gratuites et moi ce n’est pas ce que j’ai vécu parce que moi je n’avais pas accès aux bourses, en fait, mes parents n’étaient pas riches pourtant et ils n’ont pas du tout contribué au financement de mes études parce que ils ne pouvaient pas à ce moment-là, enfin ils ont… Voilà, ils ont fait ce qu’ils ont pu, en fait, et moi je n’avais pas accès aux bourses, donc non ce n’est pas gratuit, je confirme. À moins d’habiter en face, tu vois, à moins de vivre dans la ville où tu étudies, mais moi ce n’était pas mon cas, et je pense que ce n’est pas le cas de la plupart des étudiants, et donc ça coûte très cher de faire des études même à l’université, parce qu’il faut se loger ou faire des trajets en train et puis il y a du matériel et puis… Enfin plein de choses quoi. Donc ouais je comprends totalement ce que tu veux dire.
Tatiana [00:10:56]:
Surtout dans des, j’ai l’impression, dans des disciplines qui ne débouchent pas nécessairement dans des métiers lucratifs comme on les considère traditionnellement, comme par exemple, on dit « on va faire médecine, puis on va finir médecin, puis on va pouvoir récupérer l’argent pour payer, peu importe, s’il y a eu des dettes qui ont été encourues ». Mais pour toi, rentrer dans cette discipline-là justement, est-ce que tu le voyais comme un risque? Est-ce que tu avais déjà une idée de ce que tu voulais faire avec ça ou c’était simplement un intérêt personnel que tu poursuivais?
Erika Dupont [00:11:25]:
Écoute, au début, c’était vraiment pour patienter le temps de recandidater à l’école d’art. Et ensuite, ça a vraiment été un intérêt. Par contre, la première année d’histoire de l’art m’a complètement accrochée quoi. Ça m’a mise dedans et je me suis dit « je ne sais pas du tout où ça va me conduire, mais je reste ». Enfin c’était… Je ne sais pas comment dire, ça venait du fond de moi quoi. Oui, il y avait des questions financières et caetera, et, tu sais, sur le moment, je me disais « ma situation est injuste, il faut que je travaille, si j’avais pas à travailler ce serait différent, je pourrais faire autre chose et tout », avec dix ans de recul, je suis heureuse d’avoir eu ces contraintes parce que sans ça je pense que je n’aurais pas été au bout et je sais que je l’aurais regretté. En tout cas, je suis vraiment heureuse d’avoir ce parcours aujourd’hui avec le recul. C’est récent, mais ça commence vraiment à me sauter aux yeux à quel point c’était important de vivre les choses de cette façon-là.
Erika Dupont [00:12:20]:
Et voilà, je suis restée, pour répondre à la question, je suis restée par passion vraiment vraiment, même si j’ai eu envie de bifurquer, tous les ans je me disais « ah je vais peut-être partir plutôt en philo ou plutôt je vais faire de l’histoire ». J’ai fait une licence d’histoire d’ailleurs en plus et j’ai arrêté au-delà, je suis restée en master d’histoire de l’art, mais tout tout m’intéressait et puis l’histoire de l’art elle est au carrefour de plein de choses, en fait, tu étudies les mathématiques aussi à travers l’histoire de l’art. Tu étudies un peu de chimie, un peu de physique, un peu de… Il y a plein de choses en fait dans l’histoire de l’art, ce n’est pas… Donc c’est quelque chose qui m’a vraiment nourrie, qui m’a vraiment vraiment nourrie pendant des années et des années. Ça, c’est clair. Et le risque, oui je le connaissais, mais voilà quoi. Je pense que j’étais dans une étape… Tu vois, c’est pendant l’année de terminale que j’ai eu un shift, donc en fait je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire, même avec un diplôme d’arts appliqués, je voulais être architecte d’intérieur, mais bon, c’était juste une idée, tu vois.
Erika Dupont [00:13:16]:
Donc non, je me suis dit « go quoi », je suis comme ça, je pense. J’ai besoin de me sentir à ma place dans le présent. Peu importe, on verra bien plus tard, tu vois. C’est… Ça a toujours été comme ça.
Tatiana [00:13:29]:
Oui, puis je pense que quand on est jeune, je pense qu’il y a une injustice aussi à demander à des jeunes de dix-huit ans ou de dix-neuf ans ou même de vingt ans, de choisir leur carrière pour le reste de leur vie. Puis je pense que, un peu en écho à ce que tu dis, dans mon cas à moi, j’ai étudié en études classiques plutôt, donc on étudiait toutes les grandes œuvres de la civilisation occidentale, puis je me disais « quand est-ce que je vais avoir l’opportunité de faire ça ou d’avoir cet espace pour me dédier à cette culture, que je trouvais extrêmement importante en tant que personne? ». Puis pour moi, j’ai vu un peu l’école, pas nécessairement comme un chemin vers le milieu professionnel, mais vraiment quelque chose qui allait me nourrir moi-même pour ensuite devenir une meilleure personne dans le monde. Mais je pense qu’il y a comme justement deux façons de voir le parcours académique, dont un qui nous prépare pour la vie professionnelle, puis un qui nous fait vraiment… Qui nous prépare pour être juste des humains bien adaptés ou du moins avec suffisamment de perspectives pour être des bons citoyens, pour pouvoir être des bons parents, puis être des bonnes personnes. Puis je pense que ça relie un peu aussi avec la mission de ton entreprise d’une certaine façon, puis j’ai envie d’en parler, mais en même temps, je pense que c’est important aussi de savoir le moment où tu as décidé de faire le doctorat, comment ça s’est passé, puis peut-être un peu ton histoire autour de ce diplôme ultime dans le parcours académique. Est-ce que pour toi, c’était clair que tu allais aller jusqu’à là? Est-ce que tu as hésité? Est-ce que c’était quelque chose que tu avais toujours voulu faire ou voulais obtenir? Qu’est-ce que ça représentait pour toi le doctorat?
Erika Dupont [00:15:23]:
Ça n’a jamais été un projet, ça n’a jamais été un projet parce que je pensais pas être capable de ça en fait. Je pensais pas être capable de faire ça et pour moi les gens qui faisaient ça c’étaient des gens lettrés tu vois. C’était pour moi des gens très loin de moi, des gens cultivés en fait, dans mes domaines en tout cas, c’était le cas, c’était des gens très cultivés. Et moi j’étais un peu en mode « je m’adapte » en fait tout le temps, je suis en mode adaptation, je passe d’un cours à un job étudiante, enfin je n’avais pas le temps de penser en fait, donc ça a toujours été compliqué jusqu’au master. En master, j’ai eu beaucoup plus de temps en fait, il y avait beaucoup moins de cours et j’ai eu plus de temps pour penser, j’ai eu plus de temps pour être en fait et ce que tu disais juste avant c’est exactement ça, j’ai jamais pensé le diplôme comme une finalité professionnelle en fait. Ça a été un tort sans doute, en tout cas à partir du doctorat c’est sûr, mais c’était une façon pour moi de me nourrir et de me conduire quelque part, mais ce n’était pas un diplôme = un métier, et je pense que ce n’est pas ça dans ces voies-là en fait. Donc j’étais totalement là-dessus, avec ce que tu disais, je suis totalement d’accord, et ça n’a pas été un projet pour moi de faire un doctorat, simplement… Déjà j’ai choisi le master de recherche parce qu’en France, à l’époque en tout cas, tu avais le choix entre la voie recherche et la voie professionnelle. Et moi j’étais salariée, donc j’avais des CDD d’un an renouvelables tous les ans, de septembre à septembre, et la voie master pro m’aurait obligée à quitter mon CDD, donc pour faire des stages – il y avait des stages obligatoires trois mois par-ci, 6 mois par-là – et moi, je me disais « comment je vais faire? Il faut que je quitte mon CDD dans ce cas-là », et ça ne paye pas assez, tu vois, tu gagnes 400 euros quand tu es stagiaire en France, tu ne peux pas payer ton loyer avec ça, et moi je n’avais pas de filet donc ce n’était pas possible.
Erika Dupont [00:17:13]:
Donc j’ai choisi la voie recherche, parce que je savais qu’il n’y aurait pas de stage. Mais quoi faire avec ça? C’est toujours une question que tu laisses un peu de côté parce que tu n’as pas la réponse de toute façon. Je me suis dit « j’aurais un master » en fait. Et donc avec un master, j’envisageais des concours, en France, il y a les concours de l’enseignement, les concours de l’administration, des choses comme ça donc je me disais on verra bien. Au pire, je passe un concours. Et à la fin du master, les concours bon, je sentais que ce n’était pas trop pour moi, je ne me sentais pas prête à ça, puis il fallait les préparer donc voilà. J’ai surtout cherché un travail en fait, après le master, et très vite, je me suis rendu compte que ça allait prendre du temps parce qu’avec mon master de recherche, j’étais prise nulle part en fait, dans les musées, ils prenaient tous les masters pros, ils ne prenaient pas les gens comme moi. Donc je me suis inscrite en doctorat pour qu’il n’y ait pas de blanc sur mon CV en fait.
Erika Dupont [00:18:02]:
C’est complètement débile dit comme ça, mais je ne vais pas te dire autre chose, je mentirais, c’est pour ça que je me suis inscrite au départ vraiment et je me suis dit « bon on verra bien, en attendant voilà, je continue à la fac », pour moi c’était aussi une façon de garder des liens avec des professeurs, avec une institution et avec… Il y avait un accès à la bibliothèque, des choses comme ça tu vois, donc je me disais « je vais me réinscrire en doctorat et puis on verra bien ».
Erika Dupont [00:18:28]:
Mon directeur évidemment m’a poussée aussi vers ça, j’ai été poussée vers ça quand même, à la soutenance de mon mémoire de master, il y avait un professeur qui était là dans le jury qui m’a proposé d’écrire un article pour une grande revue académique, donc enfin, je dirais que j’étais quand même bien poussée vers la recherche. Je sentais que j’avais peut-être quelque chose à faire là et que je travaillais bien. Donc je me suis dit « allez, je vais m’inscrire, on verra ». Mais je n’ai jamais dit « ah moi je vais faire un doctorat et je vais devenir enseignant chercheur et du coup je m’inscris en doctorat ». Si j’avais pensé les choses comme ça, je n’aurais pas fait toutes les erreurs que j’ai faites, j’aurais mieux pensé mon projet et… Enfin j’aurais appliqué tous les conseils que je donne aujourd’hui aux jeunes chercheurs parce que c’est des choses qu’on ne m’a pas dites à l’époque, qu’on ne dit toujours pas aux étudiants en fait – en France en tout cas – et c’est pour ça que j’ai créé l’agence Conseil aux Jeunes Chercheurs pour expliquer tout ça en fait, ces choses que j’aurais dû entendre à l’époque. Si j’avais su dans quoi je m’embarquais vraiment, j’aurais pris une année entre deux pour préparer les choses, j’aurais… Enfin je n’aurais pas du tout agi de la même façon.
Tatiana [00:19:31]:
Vraiment intéressant. Puis merci aussi de ton ouverture, parce que je pense que, encore une fois, ce que j’aime beaucoup avec ton histoire, c’est cette réalité vraiment ancrée de « non, ce n’est pas tout rose et oui, il y a une notion de privilège qui vient avec même le choix du type de diplôme qu’on va être capable de faire et les opportunités qui vont s’ouvrir à nous face à ça ». Puis, une des choses que j’ai déplorées peut-être un peu… Pour moi, ça s’est terminé après la maîtrise, je n’ai pas continué au doctorat, mais parce que je voyais la précarité dans laquelle beaucoup de chargés de cours vivaient, même alors qu’ils avaient obtenu ce diplôme-là. Et pour moi, ça m’a un peu fait peur. Mais je suis curieuse d’entendre plus sur ton expérience, les effets que ça a eu sur ta santé, comment tu as traversé aussi cette étape-là. Puis justement, comment tu en es arrivée à vouloir dire « ok, il faut que j’en fasse un peu ma mission de parler de ça, de préparer aussi les chercheurs » parce qu’il a quelque chose de très beau dans l’intention de quelqu’un de vraiment se plonger dans sa discipline et aussi ce danger dont on nous parle pas.
Erika Dupont [00:21:03]:
Ouais. Moi le truc justement qui a, je pense, qui a été horrible, enfin terrible – et à la fois si je l’avais appréhendé autrement, si je serais peut-être pas allée en fait, si j’avais su, j’aurais raisonné comme toi, je n’y serais pas allée. Donc quelque part, c’est bien. Moi, en fait, justement, j’étais dans la précarité énorme depuis la première année d’études, j’étais vraiment précaire et quand j’entendais des échos, des gens qui disaient « oui, mais le doctorat, c’est la précarité. Oui, mais le doctorat, c’est un monde de privilégiés, et caetera », pour moi, les gens qui disaient ça, c’était des gens privilégiés qui ne se rendaient pas compte qu’ils l’étaient. Tu vois, c’était des amis, des gens de mon entourage. Les parents payaient leurs loyers tous les mois depuis des années, c’était des gens qui avaient eu les moyens en fait de faire ce parcours jusqu’au master, et moi je me suis dit « la précarité ça ne me fait pas peur j’y suis en fait, j’y suis déjà, donc ça ne me fait pas peur parce que payer mon loyer en travaillant enfin c’est ce que je fais déjà ».
Erika Dupont [00:22:04]:
Donc j’y suis allée en me disant ça peut pas être pire en fait, c’est déjà ce que je vis et là je me trompais, c’était une énorme erreur en fait, c’était pas du tout ça, le doctorat n’est pas comme les études précédentes en fait. On peut pas faire un… Enfin pour moi, c’est compliqué de faire un doctorat en travaillant, parce que la différence, c’est que tu as… En master, encore tu as des cours, tu dois écrire un mémoire et caetera, tu es étudiant en fait. Tu as des examens et caetera. En doctorat, ce n’est plus le cas, tu n’as pas d’examen et la seule façon que tu as pour te démarquer, c’est d’étoffer ton CV, c’est de publier dans des revues, c’est de participer à des colloques, c’est d’être actif dans ton laboratoire, c’est de faire connaître tes travaux, c’est tout ça. Ce n’est pas juste la thèse, et même la thèse, ce n’est pas un mémoire. En master, tu dois créer un mémoire et tu dois donc faire un peu de la recherche, bon tu vas lire, tu vas explorer un nouveau domaine, mais tu peux le faire de chez toi. Alors qu’en doctorat – moi en tout cas en recherche historique – il fallait se déplacer pour aller chercher des archives… Enfin il faut créer de la valeur, il faut créer quelque chose de nouveau. Ce n’est pas juste une synthèse de ce qui existe déjà. Il faut créer une étude, il faut la mener.
Erika Dupont [00:23:16]:
Donc ça prend du temps et tu ne peux pas consulter des archives, des services d’archives le week-end ou le soir, en fait, c’est des heures de travail, donc ça ne va pas. Et moi, je devais aller à l’étranger – j’avais un sujet britannique pour ne rien faciliter – donc il fallait que j’aille en Angleterre, il fallait que je prenne l’Eurostar, il fallait que je me loge à Londres. Enfin, tu vois, c’était des frais mais colossaux que je n’avais pas du tout anticipés parce qu’en master, j’avais déjà travaillé sur ce sujet et ça s’était bien passé. J’avais fait quelques déplacements, mais bon ça allait tu vois. Et en doctorat, ça n’a rien à voir. Il faut vraiment le voir comme un emploi à temps plein parce que tu as énormément de responsabilités différentes.
Erika Dupont [00:23:55]:
Chaque fois qu’on te propose un projet, il faut essayer d’y aller de façon intelligente, faire la part des choses. Il ne faut pas juste y aller parce qu’on te le propose et que ce sera bien sur ton CV. Non, il faut avoir une stratégie globale. Il faut comprendre à quoi ça va te servir et est-ce que ça va vraiment te servir. Moi, en fait, j’ai gardé mon emploi, j’ai fait tout ça. Donc je travaillais jour et nuit simplement, vraiment jour et nuit pendant des années. Donc, je me suis épuisée très vite. Je ne gagnais pas d’argent, parce que je ne gagnais rien avec l’université, avec toutes mes activités bénévoles de l’université.
Erika Dupont [00:24:29]:
Tu publies, c’est gratuit, tout ce que tu fais, personne ne te paye pour ça. Donc… Et les heures d’enseignement que j’avais, c’était payé, mais des mois, voire des années plus tard. Donc il fallait que j’ai un job à côté et c’est ça qui m’a mise dedans au fur et à mesure. La première année, ça a été, mais la deuxième, ça a été compliqué, puis la troisième encore pire. Donc très vite, j’ai compris ça évidemment, j’ai compris tout de suite, en première année, qu’il fallait s’investir beaucoup plus, sinon ça servait à rien parce que tu allais pas… Tu allais sortir du doctorat comme avec ton master en fait, tu ne feras rien avec ça. Moi, j’avais bien vu qu’avec mon master de recherche, je passais après tout le monde sur les offres d’emploi et donc j’avais peur que ça se reproduise avec un doctorat. Donc je me suis dit « si je veux vraiment faire un doctorat et ça me serve, il faut que je fasse ce qu’on me demande quoi. Il faut que je sois chercheuse vraiment. Il faut que je crée un réseau, il faut que je crée des événements, il faut que je fasse le métier de chercheur et que j’enseigne et caetera. »
Erika Dupont [00:25:21]:
Donc je me suis épuisée, donc vite j’ai essayé de lâcher mon travail alimentaire, j’ai essayé de trouver un financement de recherche, ça m’a pris trois ans. J’ai enfin trouvé un financement de recherche en quatrième année de thèse, un financement très prestigieux de l’université de Yale, donc ça m’a sauvée, et franchement, ça m’a sauvée à la fois financièrement et pour mon CV. Enfin, je veux dire quand tu as Yale sur ton CV, c’est bon. Enfin, je veux dire, tu peux faire à peu près tout ce que tu veux. Donc c’était vraiment un miracle en fait. C’était un miracle parce que c’était improbable d’avoir ce financement. J’avais déjà tenté plusieurs fois d’avoir ce financement, parce qu’il sortait tous les ans, c’était trop dur.
Erika Dupont [00:26:03]:
Franchement, là, c’était un miracle. Je ne sais pas ce qui s’est passé, pour qu’on me le donne. Mais bon, j’avais travaillé pour bien sûr. Donc je l’ai eu, mais une fois que… Donc c’était un financement pour terminer ma thèse à Londres, donc là, je quitte mon emploi, je quitte tout en France, je pars vivre à Londres et au bout de trois mois, je m’effondre en fait, je m’effondre. J’étais épuisé déjà bien avant, bien avant. Je pense que j’étais déjà en burn-out au tout début du doctorat. Donc là, vraiment, j’étais dans un état catastrophique. J’ai été hospitalisée une première fois en France, donc je suis revenue en France malgré le financement étranger. Du coup, j’étais extrêmement stressée. J’avais peur en fait que… Je ne sais pas, qu’on m’enlève le financement ou tu vois, je ne savais pas trop comment ça fonctionnait.
Erika Dupont [00:26:45]:
Et donc j’ai laissé de côté ma santé malgré l’hospitalisation. Donc trois mois plus tard, je suis retournée à l’hôpital parce que j’étais toujours dans un état compliqué. Et voilà. Donc j’ai fini l’année tant bien que mal. J’ai fini la thèse aussi tant bien que mal et j’ai réussi à soutenir, mais dans un état… Je ne peux pas te décrire quoi. C’est impossible à décrire. J’étais vraiment au bout de ma vie, comme on dit. J’étais au bout quoi, je ne savais plus, j’étais perdue, j’étais épuisée physiquement et psychologiquement, vraiment. Donc voilà comment j’ai fini le doctorat. Fini et vécu le doctorat, ça a été compliqué.
Tatiana [00:27:23]:
T’as jamais voulu lâcher? Qu’est-ce qui t’a amenée à vraiment pousser jusqu’à la fin?
Erika Dupont [00:27:31]:
Si j’ai envisagé de lâcher, j’ai même lâché, je crois que c’était en deuxième, en troisième année, j’ai lâché pendant quelques mois parce que je sentais que ma vie ne tenait qu’à un fil en fait, mais lâcher pour faire quoi en fait? Lâcher pour faire quoi Et c’est là que les questions sérieuses arrivent quand même, parce que tu les mets de côté et tu fais des études pour te nourrir intérieurement comme on disait tout à l’heure, mais le jour où il faut vraiment faire quelque chose, parce que c’est une question de vie ou de mort presque, il n’y a pas d’idées qui viennent. J’allais faire quoi? J’allais faire quoi en fait, avec un master de recherche et un bout de doctorat en histoire de l’art… Non, en fait c’est la peur qui m’a tenue, c’est la peur qui m’a fait continuer. Je me suis dit « maintenant il faut aller au bout parce que de toute façon sinon tu recommences à zéro autre chose dans ce cas-là ». Je me disais « je pourrais rien faire avec ça donc il va falloir que je reprenne une autre formation », plus « qualifiante » on va dire, et donc je me suis dit « quitte à devoir recommencer même un BTS, c’est quand même un peu dommage, autant essayer de finir ça » puisque de toute façon pour moi, il restait un an ou deux de travail à ce moment-là, tu vois. Donc j’ai tenu comme ça.
Tatiana [00:28:38]:
Je trouve intéressant que tu dises que tu voyais pas d’autres issues que le doctorat et que à la fin du doctorat, tu lances une entreprise qui est… Je pense l’entrepreneuriat étant le domaine où les diplômes comptent le moins.
Erika Dupont [00:29:45]:
Oui, c’est vrai. Enfin, ça dépend dans quoi.
Tatiana [00:29:45]:
Ça dépend dans quoi naturellement, mais il y a une… Je ne sais pas, il y a quelque chose d’intéressant dans cette notion à mes yeux, parce que c’est quelque chose que, personnellement j’essaye aussi beaucoup de déconstruire, entre devoir avoir un diplôme pour pouvoir réussir professionnellement, pour pouvoir être utile aussi dans la société, versus aussi transformer des diplômes qui ont l’air inutiles en quelque chose de complètement autre, mais qui est tout aussi valorisé sinon plus. Il y a ce transfert de valeur que je trouve intéressant dans ce que tu dis aussi.
Erika Dupont [00:29:46]:
Ouais, je suis d’accord. Mais là tu vas me lancer sur un sujet qui m’occupe totalement, je veux dire, c’est… Pour moi, c’est des questions que je me pose tous les jours et quand je repense à l’ensemble de mon parcours, je trouve que c’est fou à quel point c’était cohérent en fait. Je ne m’en rendais pas compte à ce moment-là, mais aujourd’hui, mais je me remercie vraiment chaque jour d’être allée au bout de ce doctorat, parce que de une le doctorat, c’est du capital. C’est du capital social, culturel, c’est du capital, mais vraiment c’est… Pour moi, c’est peut-être la seule richesse que j’ai, tu vois, en fait. Puisque j’ai pas d’argent, enfin j’en avais pas à la sortie du doctorat… Enfin c’est le doctorat, le fait d’être passée par Yale, je sais ce que ça vaut et et je sais m’en servir en fait aujourd’hui. Tu disais je me suis lancée dans l’entrepreneuriat après la thèse, oui je pense qu’il y a un énorme parallèle entre l’entrepreneuriat et la thèse non financée, parce que je me rendais pas compte que j’étais entrepreneure de ma carrière en fait finalement, tu vois, je travaillais pour payer mes études, donc aujourd’hui je travaille pour payer mes charges, comme avant en fait, et pour une mission qui est au-dessus, qui est au-delà d’un job. Tu vois, pour moi ce n’est pas alimentaire, c’est… Il y a une mission, il y a quelque chose qui me nourrit réellement tu vois. Et le fait que… Ouais, tu dis « il ne faut pas de diplôme pour l’entrepreneuriat », c’est vrai, mais pour faire ce que je fais, j’en avais besoin. J’aurais jamais pu… Je pense en tout cas, je n’aurais jamais pu créer l’agence et être crédible, si j’avais abandonné mon doctorat et… Enfin, j’aurais pu conseiller, mais franchement je n’y aurais pas cru moi-même, donc je ne l’aurais pas fait.
Tatiana [00:31:21]:
Non.
Erika Dupont [00:31:22]:
Je ne pense pas que j’aurais la même crédibilité.
Tatiana [00:31:24]:
Non, puis je pense qu’on crée les entreprises qui sont cohérentes avec nous-mêmes aussi, avec notre histoire. Puis un de mes bastions ou de mes grandes croyances, c’est : on se réapproprie notre histoire à travers notre entreprise, et notre entreprise devient parfois même des lieux de guérison de certaines parties de notre histoire. Et je me demandais aussi est-ce que, après avoir vécu tout ça – parce que là ce qu’on entend aussi c’est : techniquement, tu as travaillé pendant quatre ans ou je ne sais pas combien de temps a duré le doctorat, mais jusqu’à ce que tu aies… Ou pendant trois ans, jusqu’à ce que tu aies ta bourse de façon bénévole, dans un métier extrêmement difficile, valorisé au niveau intellectuel, mais pas nécessairement valorisé au niveau financier. Est-ce que tu as déjà eu du ressentiment envers la structure académique elle-même qui amène les gens à rentrer dans ce genre de situation qui casse beaucoup de personnes aussi, puis qui peut les… ben qui a eu des effets dévastateurs aussi sur ta santé, mais tu n’es pas la seule, il y a beaucoup de personnes aussi qui vont passer dans des situations comme ça ?
Erika Dupont [00:32:38]:
Oui, oui, oui, là, c’est très clair. Oui, j’ai eu énormément de colère envers l’université et j’ai eu énormément de colère parce que je me suis dit « je me suis faite avoir en fait par cette belle idée d’ascenseur social, tout ce qu’on nous vend entre guillemets », pour moi il y a une grosse arnaque là derrière c’est évident et j’ai été très en colère et je pense que j’en reviens maintenant. Comme tu parlais avant, le fait de m’exprimer sur les réseaux sur ces sujets-là, moi j’ai commencé tout de suite… J’ai attaqué en fait au départ quand je suis arrivée sur LinkedIn, je faisais des posts qui n’avaient rien à voir avec ce que je fais aujourd’hui. J’étais très en colère, je m’en rends compte aujourd’hui. Je me sentais vraiment… Ouais j’étais en colère contre le système. Je pense qu’il y a beaucoup d’hypocrisie à l’université, je pense qu’on exploite énormément les jeunes chercheurs, on exploite la passion des jeunes, on exploite tout en fait, je veux dire. Et je pense aussi qu’il y a une différence entre l’université jusqu’au master et l’université en doctorat. Ce n’est pas la même… C’est la même université, moi, j’ai fait tout mon cursus dans la même université, et pourtant je pense que licence/master, il y a une sorte d’ouverture alors qu’en doctorat il y a un entre soi vraiment qui est là. Il y a des informations qui passent pas, il y a des choses qu’on ne me dit pas, qu’on ne m’a pas dites.
Erika Dupont [00:34:02]:
Il y a la formation de master qui est juste incroyablement mauvaise, je pense en tout cas dans les SHS, dans les sciences humaines et sociales, on est extrêmement mal formés en master de recherche. Je pense qu’aujourd’hui en master de recherche, il serait temps qu’on parle du doctorat aux jeunes chercheurs, enfin qu’on les prépare en fait au doctorat, qu’on utilise ces deux ans pour créer des projets de recherche, parce qu’en fait à part le doctorat, tu ne peux pas faire grand-chose avec un master de recherche. Donc dans ce cas, pourquoi ne pas parler du doctorat? Pourquoi ne pas dire aux jeunes chercheurs, attention au calendrier? En deuxième année de master, tu es censé déjà préparer ton projet de thèse si tu veux t’inscrire l’année suivante, ce n’est pas pendant la thèse que ça se passe, c’est avant. Et donc on devrait nous apprendre à faire le métier de chercheur, on devrait nous apprendre ce qu’est un financement de recherche, on devrait nous apprendre comment fonctionne la recherche française, quelle est l’actualité de la recherche… Tout ce que je propose en fait à travers la formation que j’ai créée, la formation Lauréat, c’est ça en fait, c’est tout ce qu’on aurait dû me dire et c’est tout ce qui m’a mise beaucoup en colère parce que je pense que sans ces informations clés, on envoie des gens dans le mur. Mais vraiment, c’est grave en fait. Il y a beaucoup de jeunes qui se suicident. Je veux dire, il y a des vrais sujets de santé mentale, de précarité, de gens qui abandonnent la thèse pour pouvoir vivre et qui ne s’en remettent jamais, en fait.
Erika Dupont [00:35:22]:
Abandonner la thèse, c’est un vrai sujet à lui seul. On compare beaucoup ça à un avortement, tu vois, enfin c’est lourd en fait. Donc ouais, il y a eu de la colère ça c’est sûr. Maintenant je me rends compte en fait à quel point c’était bien que je passe par tout ça pour pouvoir créer ce que j’ai créé aujourd’hui, il fallait que je passe par tout ça. Donc je sais que ça détruit plein de gens, ça m’a détruite aussi. Je pense que je ne retrouverai jamais la santé que j’avais avant vraiment, c’est fini. Mais bon, je me dis quelque part, c’était « bien » entre guillemets et j’essaie de tirer le positif et je suis quand même beaucoup moins en colère, je pense aujourd’hui, même s’il y a encore des choses qui me font bondir parce que je le vois au quotidien et j’hallucine encore de… Le dernier post que j’ai sorti là mardi sur un rendez-vous que j’ai eu avec un directeur d’école doctorale complètement à côté de la plaque, enfin c’est juste dingue. Mais bon, c’est comme ça.
Erika Dupont [00:36:19]:
Je pense que des managers qui sont à côté de la plaque, il y en a partout. Il faut faire avec. Et voilà, j’essaye de relativiser aussi et de me concentrer sur le positif parce que c’est ce qu’il faut faire, je pense.
Tatiana [00:36:33]:
Oui, puis, c’est sûr que bon, ce n’est pas juste l’Academia qui est dans cette vision exploitative aussi. Je veux dire n’importe quel milieu où il y a des stages aussi est très exploitatif. Il y a beaucoup d’exploitation ailleurs aussi dans l’éducation, et en même temps, c’est ça, t’as transmuté un peu cette expérience pour en faire quelque chose où les personnes qui choisissent d’entrer dans cette aventure-là, vont pouvoir se protéger ou du moins le faire d’une façon un peu plus consciente et préparée. Pourquoi penses-tu que les universités ne préparent pas ou… Bon, laisse-moi répéter la question. Qu’est-ce que les universités pensent de ton programme – ou les écoles doctorales?
Erika Dupont [00:37:30]:
Alors ça c’est une vraie question je ne sais pas vraiment, je parle beaucoup avec des administratifs à droite et à gauche des écoles doctorales, des collèges doctoraux sur les réseaux, qui viennent me parler en privé ou qui de temps en temps commentent. Globalement, je pense qu’il y a une certaine défiance, que je peux comprendre parce que je n’ai pas été tendre en fait. C’est moi qui ai un peu déclaré la guerre au départ parce que j’étais en colère et que j’ai… Voilà, j’avais besoin en fait de parler de tout ça, de sortir en fait tout ça, de me dire que… Enfin quand tu vois en fait les posts que tu peux lire sur le doctorat sur les réseaux, en tout cas il y a deux ans, c’était juste fou en fait, ce n’était pas du tout la réalité que j’avais moi vécue et je savais que je n’étais pas la seule. Il y a plusieurs mondes parce qu’il y a les sciences dures et il y a les sciences humaines qui sont… Dans la recherche qui sont deux mondes totalement différents, avec des règles différentes. Et les sciences humaines et sociales sont reléguées vraiment au second plan. Il ne faut surtout pas parler de tout ça, il faut parler de passion, il faut travailler pour rien, il ne faut pas parler d’argent, il ne faut pas parler de réalité économique. Et ça pour moi c’était non il fallait, il fallait que quelqu’un en parle et j’ai eu besoin d’être cette voix-là en fait au départ. Donc il y a une défiance qui est normale aujourd’hui d’écoles doctorales et caetera, même si j’ai toujours toujours été invitée à droite et à gauche dans les labos, il y a toujours eu des chercheurs titulaires, des administratifs aussi qui m’ont invitée pour me dire « c’est bien, il faut en parler. Est-ce que tu peux venir en parler à l’école doctorale aux jeunes chercheurs etc? », donc je pense qu’il y a un peu les deux. Il y a des gens qui ne me supportent pas je pense.
Erika Dupont [00:39:09]:
Il y a des gens qui soutiennent réellement ce que je fais, qui sont d’accord, en tout cas, peut-être pas avec tout, mais qui globalement soutiennent largement l’agence et je le sais, ils sont… Ce sont aujourd’hui des gens avec qui je parle et je sais qu’il y a aussi une majorité silencieuse, donc je pense qu’on est sur du 50/50 peut-être. Mais voilà pourquoi je pense que… Enfin tu avais… Je ne sais pas vers où tu veux aller avec cette question, je te laisse…
Tatiana [00:39:36]:
Non, mais c’est ça, je me posais la question parce que justement, parfois je ressens qu’il y a une scission entre le milieu, encore une fois très très passionné, très – je sais pas si je veux utiliser le terme « élitiste », mais c’est ce qui me vient – de la recherche doctorale qui… Tu sais, on parle souvent de la tour d’ivoire puis des choses comme ça pour décrire ce milieu-là qui parfois peut sembler aliénant pour beaucoup de personnes aussi qui justement veulent avoir un pied peut-être dans la entre guillemets « vraie vie », tu sais, genre avoir un impact. Tu sais pas juste rester dans les livres ou pas juste rester dans dans un milieu qui est déconnecté nécessairement du reste de la société. Et d’un autre côté, je sens une ouverture de certaines universités d’être un peu plus actualisées puis de répondre aux besoins qui se développent de plus en plus aussi, où un peu tout le monde devient entrepreneur de sa vie pour le bon ou pour le mauvais, parce que d’un côté, si tout le monde devient entrepreneur, on prend aussi le risque de ne plus être protégé par des grandes structures, de ne plus être protégé par des bénéfices qui seraient partagés dans le collectif. Il y a des avantages d’être très débrouillard et de pouvoir créer de la valeur par soi-même et aussi des désavantages. C’était peut-être juste une réflexion ou une question par rapport à cette grande thématique qui m’habite.
Erika Dupont [00:41:12]:
Oui, je pense qu’il y a… Je pense que tu as raison, il y a une scission, il y a des gens qui sont pour l’entre soi et que ça n’arrange pas cette ouverture, mais il y a des gens qui sont ouverts. Et c’est là que je prends la mesure de ce que mes posts ont pu… Au début, tu sais quand je faisais des posts un peu en colère, je pense que ça sapait vraiment le travail de ces gens-là qui bossent réellement sérieusement avec toute la bonne volonté du monde pour essayer de changer les choses de l’intérieur. Je pense qu’il y a des vrais professionnels dans le milieu de l’université qui sont là, qu’on n’entend pas parce qu’ils sont occupés à travailler en fait. Et je pense qu’il faut faire très attention. Je comprends peu à peu, j’ai compris ça peu à peu et j’ai mesuré un peu plus les choses dans ma communication. Je sais qu’il y a des gens qui bossent à fond pour ça et et malheureusement je regrette que tout soit aussi complexe en fait, dans l’administration française dès que tu veux faire quelque chose en fait on t’en empêche. Donc d’un autre côté, je pense que l’université elle est ce qu’elle est grâce à ça aussi. L’université, c’est une institution, pour moi c’est quelque chose d’extrêmement respectable, quand je tape sur l’université, je tape sur certains administratifs qui… Dont enfin… On n’en peut plus en fait de ces gens-là, mais ce n’est pas que ça.
Erika Dupont [00:42:37]:
L’université moi c’est… Je suis au service de l’université, je suis totalement investie pour l’université. J’adore l’université, je la respecte, elle me fascine, elle continuera toujours de me fasciner, je pense, et si j’ai créé l’agence, c’est justement pour pouvoir agir de manière beaucoup plus libre, directe, simple, sans passer par des administrateurs, des réunions, des trucs, enfin il y a tellement d’instances que c’est… Personne n’y comprend rien, tu ne sais jamais pourquoi ce n’est pas passé, pourquoi tes idées ça prend cinq ans pour avoir le moindre petit… Tu vois. Avec moi, enfin je veux dire, moi, mais j’ai besoin de travailler autrement en fait donc c’est pour ça. J’ai envisagé, à l’époque où j’étais doctorante de passer des concours pour travailler dans l’administration universitaire. J’étais représentante des doctorants en France, j’ai toujours été très investie, j’ai assisté à tous les conseils de mon laboratoire, à tous les conseils de l’école doctorale. J’étais toujours présente pour faire des idées, des tables rondes, pour représenter le doctorant, essayer d’améliorer les conditions de travail et caetera. Donc j’ai vu pendant mes années de thèse, combien c’était compliqué, combien c’était lent et combien en fait ça changerait rien tu vois. Donc c’est pour ça que j’ai créé l’agence et même s’il y avait une défiance au début, aujourd’hui j’essaie quand même plus de travailler main dans la main avec l’université. Il y a des choses que je ne peux pas tolérer, il y a des choses que j’ai envie de dénoncer, mais il y a aussi des choses positives que j’ai envie de dire et j’espère en tout cas que ça se sent que j’aime profondément l’université et qu’elle reste à mon sens la garante de cet « ascenseur social » entre guillemets. Je pense quand même qu’il y a beaucoup de positif et qu’en France, on a cette chance d’avoir cette université-là en fait. C’est évident. Ça répond à ta question.?
Tatiana [00:44:21]:
Oui et je suis avec toi dans le sens que, moi aussi j’ai travaillé plus au côté administratif des universités, et il y a une vraie valeur de création de connaissances ou d’approfondissement des connaissances qu’on ne peut pas enlever même à chaque personne qui travaille dans ce milieu-là. Puis justement, je pense que c’est pour protéger les personnes qui sont vraiment investies à faire avancer le savoir que je trouve ça génial que tu aies pris en main un projet comme ça parce que malheureusement, encore une fois, il y a des traits toxiques qui empêchent que cette connaissance soit disséminée ou qu’elle puisse être créée dans des conditions qui ne sont pas de l’exploitation ou qui ne sont pas justement détrimentielles, ou juste comme la loi du plus fort, le plus fort va survivre et avoir le poste de professeur, mais quelque chose d’un peu plus humain. Ça, c’est vraiment par pure curiosité. Est-ce que tu travailles… Parce que c’est sûr que moi, genre, pis c’est juste ce que j’ai réalisé en étant en histoire de l’art, mais il y avait beaucoup plus de femmes que d’hommes. Est-ce que tu travailles plus avec des femmes selon toi ou c’est quand même assez égalitaire d’un point de vue genré?
Erika Dupont [00:45:45]:
Aujourd’hui?
Tatiana [00:45:45]:
Oui dans ton entreprise.
Erika Dupont [00:45:46]:
Alors au début, j’avais que des clientes. Il n’y a que des femmes qui venaient et ça s’est équilibré au fur et à mesure. Alors je n’ai pas les chiffres, mais je sais qu’on n’est pas loin du 50/50 aujourd’hui. Il y a autant d’hommes que de femmes qui viennent vers moi. Et franchement, je ne ressens pas… Et même au niveau de mes partenaires ou des personnes qui me contactent pour me proposer des choses, du travail avec elles ou des choses comme ça, vraiment, je ne ressens pas de… Je ne ressens plus de différence. Mais au début, c’est surtout des femmes qui venaient vers moi. Ça, c’était évident.
Erika Dupont [00:46:17]:
Je me disais « mais ce que je fais là? Comment ça se fait que j’attire que des femmes? » Et puis en fait, ça s’est résolu tout seul. Donc je ne sais pas.
Tatiana [00:46:25]:
Ouais, je pense qu’il y a un truc de discipline aussi. Il y a certaines disciplines qui vont attirer plus de femmes que d’hommes.
Erika Dupont [00:46:31]:
Oui, c’est vrai. C’est vrai. En fait j’attire beaucoup les sciences humaines et sociales, ce qui est logique parce que les difficultés, les problématiques dont je parle c’est vraiment celle des SHS, et il y a beaucoup plus de femmes dans les SHS. Je ne pense pas me tromper là, c’est toutes les filières artistiques… Alors après il y beaucoup d’hommes quand même aussi en psychologie, en droit ou dans ces filières-là, mais c’est vrai que les lettres, les arts, l’histoire, là, on a plus de femmes, je pense quand même. Donc c’est peut-être ça aussi.
Tatiana [00:46:56]:
Ouais, puis on n’a même pas touché à la problématique des femmes au doctorat parce que bon, souvent, c’est aussi l’âge où on va tomber enceinte, où on va vouloir construire des familles ou tu sais. Il y a d’autres enjeux aussi qui se mêlent à notre disponibilité, notre énergie, puis nos opportunités aussi qui sont créées là professionnellement ou justement fauchées. Je parlerai vraiment longtemps avec toi, y’a comme plein de questions que j’aimerais échanger avec toi, mais on va… Je vais te poser une dernière question peut-être qui serait : selon toi, qui devrait se lancer dans l’aventure doctorale et qu’est-ce que tu aimerais leur offrir comme conseil alors qu’ils considèrent cette décision?
Erika Dupont [00:47:45]:
Ça, c’est une vraie question. Je pense que les personnes qui sont attirées par la recherche sont toutes les bienvenues en recherche. Franchement je t’ai raconté de quelle manière je me suis moi lancée en doctorat. Ça n’avait rien de glorieux, ça n’avait rien de calculé, de stratégique, rien du tout. J’étais juste passionnée par mon sujet de master. Je sentais que je bossais bien et voilà j’y allée un peu comme ça. Tu vois, au début, j’étais un peu la touriste de service et pourtant aujourd’hui j’ai quand même créé une agence dans le domaine de la recherche grâce au doctorat. Je veux dire enfin ça a changé ma vie franchement, ça a changé ma vie, ça a changé mon regard sur moi-même, sur ce dont je suis capable, sur… Enfin ça m’a changée totalement en fait de l’intérieur. Donc c’est difficile à expliquer et je pense qu’on n’est pas tous, on n’y va pas tous pour une question de transformation intérieure.
Erika Dupont [00:48:34]:
Moi, je n’y serais pas allée pour ça. Mais ce que je veux dire, c’est que quoi qu’il arrive, tu vas en ressortir avec quelque chose de fou. Donc moi, je parle au quotidien avec des gens qui me disent « je suis attirée par la recherche depuis toujours, mais je n’ose pas y aller, aujourd’hui j’ai quarante ans, cinquante ans, j’aimerais y aller », mais ils hésitent encore tu vois. Et moi je me dis « waouh, c’est fou. Enfin non, allez-y allez-y », déjà. Enfin, c’est une voie qui… Enfin si tu es attirée, vas-y, c’est tout. Moi je ne comprends pas en fait qu’on puisse se dire « je n’y vais pas parce que ce n’est pas pour moi ou… ». Non vas-y. Et puis si tu y es, c’est que c’est pour toi. Enfin je veux dire, si tu as les résultats pour et que tu es passionné par un sujet et que ça fait longtemps que tu y penses et que tu sens qu’il y a un truc qui t’attire, vas-y et je ne pense pas que tu seras déçu franchement. Après oui, il faut faire les choses bien, ça je ne peux pas le nier, il faut penser le projet, c’est… En fait ce qui est problématique avec ce projet-là, c’est que c’est un projet passion. C’est toujours un projet passion.
Erika Dupont [00:49:30]:
Tu y vas par passion et donc tu tu n’as pas du tout les mêmes logiques que tu aurais pour un emploi normal – enfin normal, tu vois ce que je veux dire. Il y a beaucoup de gens qui se reconvertissent vers la recherche et qui le voient un peu comme… Voilà, c’est presque un loisir. Et là c’est une énorme erreur. Là attention, il y a un vrai piège, parce que ce n’est pas parce que c’est un métier passion, qu’il n’y a pas des vraies logiques économiques derrière, des vraies logiques d’emploi, de carrière. Il faut faire attention à plein de choses et là vraiment il faut être vigilant parce qu’il ne faut pas y aller en mode « allez j’y vais ça va être génial, je vais étudier l’art, l’histoire de l’art ou je sais pas et ça va être top ». Non non, attention il y a tellement de choses à savoir que là faut pas tomber dans ce piège-là. Sinon je vois pas le problème. Allez-y ! Allez-y ! C’est vraiment des métiers passion, on peut vraiment s’épanouir je pense en recherche malgré les conditions de travail et malgré tout ce qu’on entend quand on est bien informé et bien préparé, ça change tout, ça change vraiment tout. Voilà.
Tatiana [00:50:28]:
Magnifique. Donc on a parlé de LinkedIn, c’est quoi les meilleures places pour te suivre, connaître ce que tu fais, découvrir l’agence et les programmes que tu offres et rester en contact avec toi?
Erika Dupont [00:50:45]:
Écoute j’aime beaucoup m’exprimer sur LinkedIn, c’est vrai, parce que LinkedIn, c’est le le réseau social où on peut le plus écrire, j’ai le droit de mettre des posts un peu longs. Donc c’est vrai que j’ai tendance à aller plus sur LinkedIn. Instagram, j’y suis aussi quand même, j’ai créé une communauté là depuis septembre. Donc ça commence à prendre forme. Ce n’est pas le même type de contenu, je vais mettre plus des choses un peu humoristiques ou des petits sondages ou les coulisses de l’agence ou des choses comme ça sur Instagram. Donc LinkedIn, Instagram et sinon YouTube. Sur YouTube, j’ai mis en ligne énormément de ressources en vidéo pour apprendre à penser son projet de thèse, pour comprendre le milieu de la recherche, pour savoir comment va se passer le doctorat, pour… Enfin tout ce qu’il y a à savoir est disponible gratuitement sur YouTube, sur la chaîne de « Erika Dupont » – c’est mon nom, ce n’est pas le nom de l’agence – et mon site internet aussi bien sûr, où j’ai publié… Tous les contenus vidéos de YouTube en fait sont disponibles sous forme d’articles de blog sur mon site et sur mon site évidemment, il y a le formulaire de contact aussi, il y a toutes les infos pour être accompagné et pour en savoir plus sur les services que je dispense.
Tatiana [00:51:47]:
Magnifique. Et puis peut-être ma dernière petite question : est-ce que selon toi, tes accompagnements sont plus adaptés au contexte français? Ou des personnes qui sont à l’extérieur, comme au Québec par exemple, pourraient bénéficier de tes programmes?
Erika Dupont [00:52:03]:
Alors ça, c’est une vraie question aussi pour moi en ce moment parce que j’ai de plus en plus de demandes de jeunes chercheurs français qui veulent faire leur thèse au Canada et qui ont besoin d’être accompagnés. Moi au départ, mon programme Lauréat, c’était vraiment pour la France. Mais aujourd’hui, j’ai dans le programme des jeunes chercheurs qui veulent s’inscrire au Canada et aux États-Unis aussi que j’ai acceptés cette année, avec qui je suis en train de un peu coconstruire le projet, de l’adapter – enfin le programme pardon. Donc c’est ouvert, je suis là pour les accompagner spécifiquement et c’est évident que dans les mois et les années à venir, je vais créer des programmes en fait spécifiques pour le Canada par exemple. Ce n’est pas encore disponible sous cette forme, aujourd’hui j’accompagne au fil de l’eau, mais c’est évidemment au programme parce que je vois que la demande est forte aussi. En France, on se pose beaucoup de questions sur le système canadien, le système américain et comme je suis passée par Yale, on pense que je peux aider, et c’est le cas, je connais bien aussi le système américain. Donc voilà, c’est possible en tout cas et il ne faut pas hésiter en tout cas à me contacter.
Erika Dupont [00:53:04]:
Moi en fait, je reçois toutes les personnes qui souhaitent être informées sur leur cas en particulier lors d’un premier rendez-vous offert. Donc il ne faut pas hésiter à prendre un rendez-vous pour venir me parler de vos projets. On en discute, je vous explique un petit peu ce qu’il y a à savoir et je vous montre en fait comment on peut mettre en place un accompagnement qui soit vraiment sur mesure.
Tatiana [00:54:22]:
Magnifique. Merci infiniment Erika, c’était tellement intéressant et encore une fois, je soutiens énormément ton travail, j’adore ce que tu fais et je pense que c’est très nécessaire tout ce que tu fais là pour éviter des traumatismes à long terme à beaucoup de gens.
Erika Dupont [00:53:42]:
Oui, c’est devenu un peu ma vocation, mais merci sincèrement Tatiana pour ton invitation. Merci beaucoup. Ça m’a fait vraiment plaisir d’être invitée sur ton podcast et voilà c’est très gratifiant et je te remercie beaucoup de t’être intéressée à tout ça, parce que je sais que tu n’es pas forcément dans le milieu. Je sais que le doctorat t’a intéressée et que le monde académique, ça a été un peu un sujet pour toi. Mais voilà quoi, je pense que c’est le cas de beaucoup de gens et on n’en parle pas assez. Donc merci de porter cette voix-là ailleurs dans d’autres lieux. Donc voilà merci beaucoup.
Tatiana [00:54:23]:
Hey! Tu es encore là? Ça veut dire que l’épisode t’a plu, c’est vraiment cool ça! Est-ce que je peux te demander quelque chose maintenant? Aide d’autres femmes comme toi à découvrir le podcast en déposant des étoiles d’appréciation pour l’Ambition au Féminin. Sur Apple podcast, c’est facile : défile tout en bas de la page de l’émission où tu vois les avis et tape sur le cinq étoiles pour faire exploser mon cœur de joie. Sur Spotify, c’est encore plus simple : navigue sur la page du balado et tape l’icône en étoile en bas de la description. Merci d’avance, je t’apprécie beaucoup.


