Connaissez-vous un étudiant au doctorat? Avez-vous un ami qui a tenté l’expérience des études supérieures prolongées? Que savez-vous de sa vie «professionnelle»? Oui, «professionnelle». Parce que dès la fin de ses cours, le candidat au doctorat ressemble beaucoup plus à un travailleur autonome en début de carrière qu’à un étudiant. Et je vais vous expliquer pourquoi.
Sans prétendre tout savoir, j’ai une expérience assez intime avec le milieu du doctorat. Du moins, assez pour vous en parler longuement. Mon mari vient de commencer son postdoctorat. Oui, un postdoctorat…! Autour de lui, ses semblables suivent des chemins variés. Certains peinent à terminer leurs études, d’autres ont quitté le milieu universitaire (parfois par choix, parfois avec tristesse) et d’autres encore ont réussi à décrocher un poste de professeur.
Alors que les universités accueillent de plus en plus d’étudiants à tous les niveaux, voici une brève description de ce que constituent les études doctorales. Mon objectif est de démystifier cette espèce mi-étudiante, mi-professionnelle que nous côtoyons.
En quoi consistent les études doctorales?
Habituellement, un doctorat compte 90 crédits* provenant de diverses activités : cours, examen(s) de synthèse, projet de recherche et thèse. Les deux premières années sont consacrées aux cours. Ceux-ci préparent les étudiants à la suite de leur parcours dont, notamment, aux examens de synthèse.
Ces examens difficiles visent à évaluer la connaissance du sujet et nécessitent la maîtrise de tout un pan de la littérature liée au domaine d’étude. Conseil personnel : durant les semaines, voire les mois, avant cet examen, tenez-vous bien loin dudit doctorant (qui peut avoir une hygiène un peu douteuse!).
Après la réussite de ces examens, l’étudiant devient candidat au doctorat (ce qu’on appelle ABD, pour All but dissertation). Et là, place au volet « professionnel ». Il n’y a plus de structure universitaire : le doctorant doit créer son projet de recherche et le défendre. Il devra ensuite mener sa recherche et rédiger sa thèse (des centaines de pages!).
À ce moment, la vie du doctorant ressemble davantage à celle d’un travailleur autonome. Il doit gérer son horaire, choisir ses contrats/sujets. Il travaille de la maison et boit beaucoup trop de café. D’ailleurs, vous réussirez à tout coup à insulter votre ami(e) en lui demandant pourquoi il est encore à l’école. Le candidat au doctorat se trouve bien loin des bancs de l’école. Il passe plutôt ses journées devant son ordinateur, dans des cafés ou à la maison.
* Certins doctorats particuliers, dont médecine ou psychologie, ont un parcours distinct. Je parle ici de doctorat de recherche, avec rédaction de thèse. Pour en savoir plus, informez-vous auprès de la faculté qui vous attire!
Qu’est-ce que ça mange, un doctorant?
Grosse question! Ici aussi, le doctorant peut ressembler au travailleur autonome : il doit gérer ses contrats ou ses projets pour payer ses factures.
D’abord, il y a les concours de bourses. Les gouvernements du Québec et du Canada offrent chaque année un certain nombre de bourses pour encourager la poursuite des études supérieures. Les critères de sélection se fondent sur la réussite (les notes), le projet de recherche (originalité, faisabilité) et le profil général du candidat. Ces bourses varient en moyenne entre 20 000 $ et 35 000 $ par année (en sciences sociales, du moins), et sont octroyées pour une durée limitée (trois ou quatre ans). Les universités, facultés et départements offrent aussi certaines bourses intéressantes à leurs meilleurs candidats.
Les étudiants aux cycles supérieurs peuvent également obtenir des contrats à l’université à laquelle ils sont affiliés. Ces contrats peuvent être à titre d’auxiliaire de recherche, où ils aident un professeur à réaliser ses projets, ou d’auxiliaire d’enseignement, où ils participent au bon déroulement des cours de premiers cycles (correction d’examen, animation d’ateliers…). Le département de l’université peut également leur confier une charge de cours. Ceci constitue généralement une belle expérience préparatoire pour le professeur en devenir.
Finalement, certains opteront pour des boulots à l’extérieur de l’université. Ici, tout est permis!
Combien faut-il de temps pour faire un doctorat?
Après les deux années de cours, le processus de recherche et de rédaction de la thèse prend au moins deux ans. La plupart obtiendront leur doctorat après quatre à six ans.
Oui, ça peut prendre six ans (et même parfois plus) pour écrire à temps plein une thèse! Cela peut sembler amplement de temps, mais le parcours est rarement un long fleuve tranquille.
Dès la réussite des examens de synthèse, le doctorant est laissé à lui-même pour suivre un parcours plus ou moins balisé. Sans échéancier, il doit arriver à déposer sa thèse, qui sera soumise à l’évaluation d’experts de son domaine. Ce n’est pas une mince affaire, surtout sachant que le produit final doit être original et de grande qualité.
Aussi, la majorité des étudiants effectueront des projets hors de leur sujet principal pour améliorer leur profil et poursuivre d’autres opportunités d’intérêt. Suivre des cours particuliers et assister à des conférences (parfois aux quatre coins du monde) font aussi partie de la routine.
La grande difficulté des études doctorales est de trouver l’équilibre entre toutes les priorités… Finir sa thèse le plus rapidement possible, effectuer suffisamment de contrats pour subvenir à ses besoins et acquérir de l’expérience et de la visibilité (en d’autres mots, publier dans des revues scientifiques) pour bonifier son profil professionnel. Comment conjuguer tout ça, en plus des pressions familiales et des obligations quotidiennes? L’équilibre travail-vie personnelle est aussi un grand enjeu pour le doctorant.
Alors petite suggestion : ne demandez pas trop souvent au doctorant s’il finit bientôt. La réponse est non, sinon il vous l’aurait déjà dit!
Sachant tout cela, quelles sont les perspectives d’avenir pour un doctorant? C’est ce que je vous réserve dans la deuxième partie de cet article « Le doctorat, est-ce que ça vaut le coup? »
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