Dans un article précédent, nous analysions les raisons pour lesquelles les études doctorales s’apparentent davantage à un emploi qu’à des études. Abordons maintenant LA question qui nous brûle les lèvres : pourquoi étudier si longtemps? Le jeu en vaut-il la chandelle? Certains croient que non. D’autres se questionnent encore… Coup d’œil sur ce qui attend ces individus ultra-éduquées une fois leur diplôme en main.
Objectif : professeur
Dans bon nombre de domaines, les étudiants au doctorat sont formés pour la carrière de professeur. Au cours de leurs études, ils approfondissent un domaine et développent leur capacité de recherche. Ils acquièrent également de l’expérience d’enseignement grâce à des charges de cours. Ils sont aussi supervisés par un professeur qui, la plupart du temps, a passé sa vie dans le milieu universitaire. Pas surprenant que plusieurs n’entrevoient pas d’autres possibilités professionnelles…
Or, avec une hausse de 68 % entre 2002 et 2011 des diplômés au doctorat, les postes de professeur se font rares. Sans oublier que ces derniers se prévalent rarement de la liberté 55 et demeurent en poste bien après l’âge de la retraite. Ainsi, en réalité seulement le cinquième des diplômés trouvent un emploi à l’université.
Pour faire partie des heureux élus, il faut beaucoup de patience et une grande flexibilité. En effet, le marché de l’emploi est rarement québécois… c’est un marché canadien, nord-américain, voire international. Il faut donc être prêt à aller à l’étranger pour acquérir de l’expérience ou pour enfin mettre la main sur son emploi de rêve.
Vous avez un parcours scolaire atypique? Pas un problème, nous sommes plusieurs à mener une vie réussie malgré les détours.
Qu’est-ce que le postdoctorat?
Après le dépôt de sa thèse, le détenteur d’un doctorat est à la croisée des chemins. Intégrer le marché du travail « traditionnel » ou tenter sa chance dans le monde universitaire?
Si le nouveau diplômé n’obtient pas de poste dès le dépôt de sa thèse, il cherchera tout de même à demeurer dans le domaine universitaire afin de ne pas mettre une croix sur ses aspirations professorales. Que fait-il alors? Un postdoctorat!
Chez nous, mon mari se donne deux ans pour décrocher un poste de professeur. En attendant, il a réussi a obtenir un postdoctorat. Ceci lui permet de poursuivre ses recherches et de continuer à se bâtir un réseau. Avec la rareté des postes de professeur, le postdoctorat devient de plus en plus un passage obligé.
Le postdoctorat consiste en fait à obtenir une subvention pour poursuivre ses recherches. Les concours gouvernementaux, où les bourses sont octroyées en fonction de la pertinence du projet, représentent sûrement l’option la plus connue. Il existe aussi des subventions au sein des universités ou de certains organismes privés.
Ces bourses s’apparentent davantage à un poste professionnel. Les candidats intéressées postulent sur une offre qui s’accompagne souvent de tâches précises, comme coordonner les activités d’un centre de recherche, appuyer un professeur dans un projet ou combler une charge de cours.
Du doctorat au monde professionnel?
Les études doctorales peuvent ressembler à un grand cercle vicieux. On vend le rêve de devenir professeur, mais il y a de moins en moins de postes pour le nombre croissant de diplômés du doctorat. Or, dans le milieu, toute autre voie est souvent considérée comme un échec, puisque l’ensemble du corps professoral (les professeurs, pas les chargés de cours!), mentors des doctorants, est issu de ce monde et n’a connu que cela. Peut-on s’en sortir? Y a-t-il une vie à l’extérieur du monde universitaire? Rassurez-vous, la réponse est oui!
On estime que 80 % des détenteurs de doctorat trouveront un emploi à titre de professionnel. Dans plusieurs domaines, les perspectives sont même très intéressantes (pensons aux laboratoires de recherche pour les étudiants en biochimie). De plus, les postes dans l’administration publique ou dans certaines grandes entreprises, en plus de correspondre au profil des détenteurs d’un doctorat, sont beaucoup plus alléchantes sur le plan monétaire que toute perspective universitaire. Il faut seulement être prêt à faire le deuil de la carrière rêvée et du prestige lié au professorat…
Tirer profit des candidats éduqués
Contrairement à la croyance populaire qui perçoit les universitaires débattant dans leur tour d’ivoire, les détenteurs d’un doctorat détiennent les compétences pour faire leur place sur le marché du travail. Ils arrivent en poste âgés de plus de 30 ans, mûrs de dix ans d’études, dont plus de six aux cycles supérieures. Il faut tirer parti de ce savoir et de cette maturité!
L’une des principales barrières à leur intégration semble être le manque de communication entre les cycles supérieurs et les entreprises. Du côté des diplômés, les ressources abondent concernant le saut vers le marché du travail. Je pense entre autres à ce livre blanc sur le futur du doctorat en sciences humaines ou à ces conseils pour aller au-delà du monde universitaire. Mais le travail ne doit pas venir que des étudiants.
Les employeurs doivent contribuer à leur faire une plus grande place, notamment en s’associant aux universités pour recruter ces candidats de prestige. De son côté, l’université doit faire son bout de chemin pour sortir du paradigme actuel et former autre chose que des professeurs. Les possibilités sont illimitées et peuvent aller des conseils pour entamer une carrière entrepreneuriale ou la création de programmes de doctorat avec stage par exemple.
Alors, ça en vaut le coup, le doctorat? Je ne pourrais répondre par la négative, car jamais l’acquisition de savoir ne devrait être un problème. Il faut toutefois réhabiliter les détenteurs d’un doctorat et leur faire plus de place en dehors du milieu universitaire. Avec leurs capacités d’analyse et de réflexion pointues, ils peuvent apporter une perspective nouvelle aux entreprises. Ceci est d’autant plus vrai de nos jours où l’innovation revêt une importance majeure dans nos sociétés.
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