En étudiant la décoration intérieure et la présentation visuelle, Joani Auger s’est fixée pour objectif d’offrir ses services aux personnes qui, comme elle, ont des particularités cognitives « hors norme ». Ayant elle-même reçu un diagnostic d’autisme avec trouble sensoriel, elle s’est donné la mission d’adapter l’environnement des personnes neuroatypiques à leurs besoins afin d’améliorer leur bien-être.
Par l’entremise de DécoAtypiques, Joani offre un service de décoration en ligne dans une approche personnalisée qui s’adapte aux conditions de chacun. Je l’ai rencontrée afin de discuter de son parcours et de ses projets.
Comment as-tu reçu ton diagnostic de TSA ?
J’ai beaucoup de mal avec le bruit et les grosses foules, ça me bourdonne dans les oreilles et c’est désagréable. Socialement, j’ai de la misère à faire du small talk et à parler de tout et de rien. Quand je n’ai rien à dire, je ne dis rien tout simplement. J’ai reçu mon diagnostique de (trouble du spectre de l’autisme (TSA) avec trouble sensoriel après avoir vécu mon « crash ». Je n’étais plus capable d’aller à l’école et je me sentais envahie dès mon réveil.
Je trouve que le milieu professionnel est plus facile à gérer que le milieu social car je sais ce que j’ai à dire ou à faire la plupart du temps. Les imprévus sont beaucoup plus faciles à gérer qu’un imprévu personnel car tu n’as pas le droit de t’effondrer, les émotions doivent être canalisés rapidement pour être en mesure de continuer le travail.
Comment l’as-tu vécu?
Au départ ce fut un soulagement, car après 18 ans d’investigation, on avait enfin trouvé. Quand nous sommes avec des gens neurodivergents, on se sent alors moins seul. Autrement, c’est très difficile de s’afficher comme on est, surtout au niveau scolaire et professionnel : tu caches ton diagnostique et tu t’efforces à faire le plus possible comme tout le monde. Sans cela, tu t’exposes en sachant que tu risques de ne pas être sélectionné par un employeur s’il n’est moindrement pas ouvert d’esprit.
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Comment as-tu développé ta passion pour la déco intérieure ?
En fait, c’est très récent. Mes critères étaient plutôt simples : je voulais un emploi avec du travail manuel et qui faisait appel à ma créativité. Au départ, j’ai voulu aller en pâtisserie, mais je ne recevais pas d’aide suffisante. C’est un domaine très physique. J’ai donc changé pour la déco.
Comment s’est passé ton parcours d’études?
Au secondaire, j’étais plutôt solitaire. Je me suis fait quelques ami.es vers le secondaire cinq quand je suis arrivée en classe de soutien émotif. Ensuite, j’ai fait quelques stages chez une fleuriste ainsi que dans une entreprise de design en boutique. Je ne me sentais pas jugée, mais je dirais qu’ils m’ont plus aidée à développer mon côté social plutôt que de vraiment me préparer au milieu professionnel.
La première fois que j’ai essayé mon DEP en décoration intérieure et présentation visuelle, j’ai quitté après un mois d’essai, et ce malgré l’aide du travailleur social. En revanche, je voulais continuer d’explorer le domaine et je suis allée étudier dans un autre centre de formation professionnelle. À présent, j’ai presque terminé et j’ai de bonnes notes. Le personnel de cette école est plus compréhensif face à mes absences et à mes méthodes de travail.
Décris-moi ton projet DécoAtypiques.
Je suis moi-même une personne très sensible aux décors et à l’environnement autour de moi. C’est quelque chose qui a beaucoup d’impacts sur mon quotidien, y compris ma qualité de sommeil. Ma clientèle visée est également neurodivergente et possède cette caractéristique. Elle est composée de personnes avec qui je sais comment initier la discussion et les faire sentir à l’aise. La compréhension est beaucoup plus facile et sans jugement. Pour ce qui est de mon nom d’entreprise, je voulais démontrer que j’avais une approche et un fonctionnement différents des autres décorateurs d’intérieur.
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En quoi tes services se distinguent-t-ils de ceux d’un décorateur d’intérieur?
Premièrement, c’est en ligne, donc il n’y a aucun frais de déplacement. Deuxièmement, c’est un service personnalisé. Chaque client possède son propre style qu’il faut déterminer selon ses besoins, ses goûts, sa situation familiale et son budget. Troisièmement, je ne parle pas vraiment des tendances du moment à moins que le client le veuille. L’important pour moi est de satisfaire ma clientèle et non de suivre la mode.
Enfin, je suis très à l’écoute de ma clientèle. C’est-à-dire que je n’ai aucun jugement sur ses préférences. Pour finir, j’ai du vécu. Pas en tant que décoratrice d’intérieur mais en tant que personne ayant des besoins particuliers. Je peux donc aisément comprendre que ces personnes ont certaines exigences reliées à leur environnement.
Est-ce qu’une personne en particulier t’a soutenue dans tes démarches ?
Après plusieurs recherches dans mon domaine, je n’ai rien trouvé. Donc j’ai demandé à ma mère de m’aider à partir mon entreprise.
Qu’est-ce qui te plaît le plus dans l’idée d’un travail autonome?
Être mon propre boss, même si c’est aussi intimidant. Tant que mes délais sont respectés, mon horaire est entièrement flexible.
Quels sont tes projets futurs?
En ce moment, je travaille sur l’un de mes premiers gros contrats, qui consiste à aménager un sous-sol de six pièces. Je me suis fixé environ un mois pour le réaliser.
Pour terminer, as-tu un conseil à donner pour les personnes qui souhaitent vivre su travail autonome?
Il faut être très méthodique et former son propre réseau de contacts. Il faut aussi avoir confiance en soi pour que les choses fonctionnent.
Pour en savoir plus sur l’entreprise de Joani, visitez la page Facebook de DécoAtypiques.
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