En tant que femmes entrepreneures, nous sommes souvent prises dans le tourbillon de nos responsabilités professionnelles et personnelles, et il devient crucial de redécouvrir le plaisir sous toutes ses formes pour maintenir un équilibre sain et nourrissant.
À travers son parcours unique, de la psychologie institutionnelle à la plaisirologie, Sarah Zerbib, nous invite à explorer comment le plaisir peut influencer positivement notre vie professionnelle et personnelle.
Dans cet épisode, on discute notamment de :
- Comment le concept de plaisirologie est né pour Sarah
- La distinction entre la plaisirologie, la sexologie et la psychologie
- Le lien entre plaisir et performance, et comment déconstruire cette notion pour vivre un plaisir authentique
- Comment intégrer des pratiques de plaisir et de beauté dans notre routine pour rester équilibrée et énergisée
- Les défis et les récompenses de se réapproprier son plaisir dans un monde souvent dominé par la productivité toxique
À propos de Sarah ZERBIB
Sarah ZERBIB est plaisirologue. Elle aime résumer ce concept en une phrase : « la sexualité est une compétence, le plaisir un art et la plaisirologie invite à s’initier à cet art”. À travers son activité, Sarah nous invite à pénétrer dans cet écrin érotique où le moindre souffle de plaisir est sublimé pour nous faire redécouvrir notre vie intime comme jamais on ne l’aurait imaginé.
Sarah nous invite à repenser notre relation au plaisir, à voir au-delà des performances et à embrasser une approche plus holistique et sensorielle de notre bien-être.
Que vous soyez à la recherche de nouvelles façons de vous ressourcer ou de redéfinir votre relation au travail et à la créativité, la conversation avec Sarah Zerbib offre des perspectives inspirantes et pratiques pour intégrer le plaisir comme une compétence essentielle et un art de vivre.
Mentionné dans cet épisode :
- Ep. 125 La beauté a-t-elle une place dans nos entreprises?
- THOMASHAUER, Regena (Mama Gena). Pussy: A Reclamation, Hay House LLC, 2018
- Le blog de Sarah Zerbib et ses liens pour la retrouver sur Instagram, YouTube, TikTok et son podcast.
- Luxe Énergie, ma nouvelle masterclass sur comment utiliser la fonction du luxe dans notre entreprise tout en respectant nos valeurs
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Transcription de l’épisode 173
Ep. 173 S’ouvrir au pouvoir de la plaisirologie avec Sarah ZERBIB
Tatiana [00:00:00]:
Vous écoutez l’Ambition au Féminin épisode 173 et aujourd’hui je reçois Sarah Zerbib et avec qui je parle de plaisirologie. Mon nom est Tatiana St-Louis et j’anime l’Ambition au Féminin, un podcast pour toutes les femmes pleines de vision, de talent et de drive qui désirent redéfinir le succès selon LEURS termes et LEURS conditions. Chaque semaine, j’explore seule ou en présence d’invités les thèmes entourant la réussite professionnelle et personnelle. Mindset, productivité, leadership, branding personnel… C’est LE rendez-vous pour réfléchir à la façon dont TU veux vivre ton plein potentiel et laisser ton empreinte dans le monde.
Tatiana [00:00:39]:
Salut les ambitieuses, j’espère que vous allez bien! Moi, ça va super bien. Je viens de passer l’après-midi à faire des cyanotypes. C’est la première fois que je expérimentais avec cette technique d’impression sur papier grâce aux rayons UV. Bref, c’est une vieille technique d’impression. Puis on a fait ça dans le parc d’une bibliothèque fait que je suis comme super zen, je travaillais avec des fleurs, avec des feuilles, avec la lumière du soleil puis pour moi, c’est vraiment important d’intégrer des pauses artistiques dans mon day to day, dans mon quotidien parce que c’est les moments où je peux me recharger. Puis en plus, c’était dans un groupe et que je pouvais parler à des gens. Je me sens pleine d’énergie, complètement rechargée et c’est intéressant que je prenne le micro là maintenant pour vous faire cette petite mise en contexte de l’entrevue que je vais vous présenter aujourd’hui parce que aujourd’hui, le thème principal dont on va parler avec mon invité, c’est du plaisir et la place du plaisir, pas juste dans nos vies, mais dans aussi nos identités professionnelles, comment on évolue à travers le monde et comment on ressent le monde en général. Et moi ça fait quand même assez… Ça fait je dirais 3-4 ans que j’ai fait un travail très conscient autour de la réappropriation de mon plaisir, pis pas juste de mon plaisir… Tu sais quand on parle de plaisir, on pense souvent au plaisir sexuel, mais c’est pas juste ça, c’est genre vraiment comme une présence à soi et à son corps que je sentais qui était de plus en plus étiolée surtout après avoir donné naissance à ma fille, surtout après avoir investi tellement d’énergie à monter une entreprise alors que je travaillais à temps plein bref avec la pandémie puis tout ça. Pour moi ça a été un travail hyper intentionnel, hyper conscient de m’assurer que je revenais dans une phase de présence à moi, mais aussi de contact avec qu’est-ce que ça voulait dire pour moi le plaisir. Et donc aujourd’hui, on reçoit Sarah Zerbib qui est plaisirologue justement et j’ai trouvé ça absolument fantastique quand j’ai rencontré Sarah.
Tatiana [00:03:18]:
On s’était rencontré parce qu’on fait partie d’un groupe commun d’entrepreneurs dans un groupe de coaching et puis lors de mon passage à Paris, on s’est rencontré avec quelques autres personnes. On se connaissait du monde en ligne, mais là, on est allé bruncher. On a appris à se connaître un peu. Après ça, on a fait une soirée, une soirée de brain storm autour genre de petites bouchées. Puis j’en ai appris un peu plus sur ce que Sarah faisait et puis sur toute son histoire et je trouvais ça absolument fascinant et je savais que je voulais l’inviter sur le podcast pour qu’elle puisse partager avec vous son expertise, mais aussi sa vision autour du plaisir. Donc qu’est-ce que c’est la plaisirologie? Qu’est-ce que ça fait un plaisirologue? Ça sonne bien, c’est un beau mot, je trouve. Et en même temps, il faut faire la différence avec d’autres mots comme la sexologie ou le métier de sexologue. Et Sarah elle aime résumer ça en une phrase qui est la sexualité est une compétence, le plaisir est un or et la plaisirologie invite à s’initier à cet art.
Tatiana [00:04:33]:
Donc ce qu’elle propose avec son travail Sarah Zerbib, c’est de pénétrer dans cet écrin érotique où le moindre souffle de plaisir est sublimé pour nous faire redécouvrir notre vie intime comme jamais on ne l’aurait imaginé. Et on va parler donc autant genre de cette connexion au corps, mais aussi : qu’est-ce que ça veut dire le plaisir est un art? Puis pourquoi l’art, la beauté, les sensations physiques sont si importantes, même quand on commence à réfléchir à notre entreprise. Pis avant que je vous laisse avec l’entrevue, ça mène vraiment bien à l’invitation que j’ai pour vous de venir à ma masterclass sur le luxe qui s’appelle Luxe Énergie parce que le luxe, le plaisir, l’éveil des sens, l’abandon à l’expérience, c’est tout des concepts qui sont reliés et qui, quand on peut enfin s’ouvrir à une définition qui n’est pas nécessairement alourdie par un contexte capitaliste patriarcal exploitatif, peut nous ouvrir la porte à un autre degré d’intimité qu’on peut créer avec nos audiences, qu’on peut créer avec nos clients, qu’on peut créer avec nous-mêmes même dans un contexte business, dans un contexte professionnel et c’est ça que je veux développer avec vous parce que pour moi le travail autour de ma conception du luxe de mon expérience et de ma responsabilité de créer des expériences pour mes clients a été énormément nourri par cette reconnexion aux sens, reconnexion au plaisir, reconnexion à la beauté qui bien souvent sont associées avec une expérience du luxe. Donc si vous voulez vous inscrire, je vous mets le lien dans les notes de cet épisode. Vous pouvez aussi aller sur aimetamarque.com/luxe pour vous inscrire à la masterclass qui va avoir lieu cette semaine. Donc sans plus attendre, je vous laisse avec Sara Zerbib et on va parler de plaisir.
Tatiana [00:06:56]:
Salut Sarah, bienvenue sur l’Ambition au Féminin. Comment tu vas aujourd’hui?
Sarah Zerbib [00:07:06]:
Très bien, on profite des rayons de soleil à Paris, j’adore.
Tatiana [00:07:10]:
Oui, pluie / soleil, la grande tension météorologique.
Sarah Zerbib [00:07:15]:
Du moment.
Tatiana [00:07:17]:
Du moment. Je suis super contente de t’avoir sur le podcast. On s’est découvert il n’y a pas si longtemps que ça, j’ai l’impression, puis je suis tombée en amour avec ton univers. Donc j’ai hâte d’en parler avec toi parce que c’est un sujet qui me tient à cœur et j’ai toujours une petite question brise-glace pour mes invités, puis celle que je voulais avoir avec toi – parce que j’ai vu le mot apparaître dans ton site web en faisant mes petites recherches – c’est comment tu définis et vis l’ambition?
Sarah Zerbib [00:07:45]:
Waouh. Oui effectivement je pense pouvoir me définir comme une personne ambitieuse et je définirais… En tout cas comment je le ressens l’ambition c’est que je me sens appelée à faire des choses et je sens que c’est quelque chose qui vibre à l’intérieur de moi, c’est pas forcément un élément très précis, mais je sens que c’est une sorte d’énergie de mouvement qui tu vois qui un peu me tire vers l’avant et qui me donne envie d’y aller. Bon des fois ça a peur aussi parce qu’on peut se dire mon ambition elle est trop grande ou on va me prendre pour une folle enfin des fois il y a un peu de l’ambivalence autour de l’idée de l’ambition surtout peut-être en tant que femme, mais pour moi c’est vraiment quelque chose qui me fait à la fois rêver, qui peut me faire peur, qui me fait envie et je me dis « ouais j’ai envie que ma vie serve aussi à ça, accomplir des choses » et parfois on en vient à accomplir des choses dans sa vie qu’on n’imaginait même pas. Il y a aussi de la beauté à observer des fois ces moments où on s’imaginait pas arriver à tel arrêt ou destination arrêt dans le sens où ça fait partie d’un voyage et on se dit « ah oui en fait c’est pas mal aussi là ».
Tatiana [00:09:16]:
Génial. Ce que j’entends, puis tu n’as pas utilisé ce terme-là, mais il y a comme une force créative, il y a un courage.
Sarah Zerbib [00:09:25]:
C’est vrai, c’est vrai.
Tatiana [00:09:25]:
Dans l’ambition.
Sarah Zerbib [00:09:26]:
Effectivement il y a un peu une phrase que je me suis dit à des moments où j’hésitais tu vois à y aller et la phrase que je me suis dit à la croisée des chemins c’est « si tu le fais pas maintenant tu le feras jamais ». Donc c’est un peu le coup de pied au derrière, mais dans le sens où je sais que j’ai envie d’y aller, mais tu vois tu as la peur de « est-ce que je vais y arriver et qu’est-ce que les autres vont penser » et tout ça et à un moment je me dis, mais c’est juste moi avec moi-même et des fois je me dis quand j’aurai 80 ans que je serai une mamie, je serai trop contente de raconter ça.
Tatiana [00:09:59]:
Génial, merci. Oui, puis j’avais trouvé ce terme-là d’ambitieuse. Et puis encore une fois, c’est un terme que je pense que les femmes se réapproprient de plus en plus au fil des ans. Puis ça m’intéresse beaucoup d’entendre ces définitions-là. À côté d’autre chose que j’ai trouvé super intéressante qui est ta définition de la plaisirologie. Puis c’est la première fois que je l’entends du moins, que j’entends ce néologisme, à moins que ce soit un mot qui existait déjà. Je ne sais pas si c’est quelque chose que toi tu t’es approprié, mais…
Sarah Zerbib [00:10:41]:
Je pourrais te dire.
Tatiana [00:10:42]:
Ouais, je serais vraiment curieuse de savoir ça. Mais la façon dont tu l’expliques dans ton site, qui est vraiment claire selon moi, et en même temps qui a besoin d’explications, je crois, c’est la case manquante entre sexologie et psychologie. Donc comment est venu ce terme et qu’est-ce qui représente, qu’est-ce que ça veut dire exactement la playsirologie?
Sarah Zerbib [00:11:07]:
Alors, pour être tout à fait honnête, ce n’est pas un mot qui vient de moi, mais ça vient d’une ex-amie puisqu’on s’est séparées amicalement. Mais on était dans un coaching business dans lequel elle m’avait introduite puisque moi à l’époque je n’étais pas du tout coach, je n’étais pas du tout dans cet univers-là et je me méfiais énormément de cet univers-là, finalement j’ai pris connaissance de ces coachs et ça a résonné à l’époque avec moi et ça répondait aussi à finalement quelque chose que je cherchais en termes de redesign de mon activité puisque je venais de l’institutionnel, j’étais psychologue à l’époque dans les hôpitaux, enfin dans des centres publics – donc vraiment une logique très très différente de quelqu’un qui bosse en indépendante – et je m’étais installée en fin 2019 donc vraiment quelques mois avant le covid et l’année 2020 en termes de psychologie ça a été très très lourd, j’ai frôlé le burn-out et je me suis dit « je ne veux pas travailler comme ça ». Donc je suis ce coaching business et je sais que je veux commencer à travailler sur autre chose, je veux travailler différemment et un des sujets qui me passionnent et qui m’a beaucoup animée sur plusieurs niveaux c’est le corps. Et donc je faisais des shootings boudoirs, je continue de faire des shootings boudoirs, j’adore tout ce qui est de l’ordre de l’esthète, la sensorialité, j’étais blogueuse beauté pendant une dizaine d’années et je renoue avec cette passion récemment et en fait cette amie elle me dit « toi ce que tu sais faire Sarah, c’est l’art du plaisir, donc en fait c’est de la plaisirologie » et je me suis dit « mais en fait c’est trop ça! », le mot il a fait « ding » dans ma tête et je me suis dit « mais oui totalement » et donc je me suis appropriée le mot ce qui n’a pas été simple parce que quand j’ai commencé à dire que j’étais plaisirologue que j’avais lancé ce concept de plaisirologie, on y associait toujours le sexe et je ne voulais pas à l’époque être labellisée avec juste cette case-là ou que des personnes libidineuses comme on en voit beaucoup quand tu es une femme et qui parle de sexe sur les réseaux, tu te retrouves avec des messages, des réflexions, et caetera. Donc j’étais un peu timide à l’époque quand j’ai lancé vraiment le concept en mars 2021, donc il y a trois ans révolus, je n’assumais pas vraiment cette identité et en même temps – si je reprends juste un aspect de de mon histoire avec le corps – j’avais fait un shooting photo en 2016, un de mes premiers professionnels, où le photographe m’avait dit « Sarah avec toi, on peut soit jouer sur la carte femme-enfant parce que tu as un visage assez rond, assez innocent, et caetera, mais en même temps, on peut totalement jouer la carte de l’érotique ». Et quand il m’avait dit ça, je me suis dit « je le sais », mais c’était une identité que j’avais encore assez peu explorée donc tu vois il y avait un peu plein de choses qui commençaient à se connecter et en fait c’est en janvier 2022, j’étais invitée à la télé pour parler de dermato, mais c’était en lien avec mon blog beauté, et je me suis… Challenge : « place le mot de plaisirologue à la télé ». Je me suis dit c’est l’engagement pour que vraiment tu noues cette identité avec ce concept-là qui tape… Enfin fait partie de toi, qui est ton essence. Et donc je l’ai placé et à partir de là je me suis forcée, dans le bon sens du terme, à vraiment l’intégrer dans une identité, à corriger les gens qui n’associaient ça que à la sexualité.
Sarah Zerbib [00:14:46]:
Effectivement la manière dont je communique autour de la plaisirologie sur les réseaux sociaux, c’est d’abord par la vie intime, mais j’aime à dire peu importe l’angle par lequel on rentre dans la plaisirologie, c’est après un art de vivre et comment je le définis? Donc il y a cette définition que je donne sur le site, mais j’aime bien maintenant aussi dire que la sexualité est une compétence, donc en soi on peut apprendre des pratiques, mais le plaisir est un art et la plaisirologie accompagne à cet art-là, parce qu’on a beau avoir toutes les techniques, si le contexte dans lequel on fait ces techniques, l’intention avec laquelle on fait ces techniques, tout ça n’est pas travaillé, que ça soit en termes de trauma, de ceci, de cela, mais en fait on va pas ressentir la richesse du plaisir de ces expériences charnelles, sensorielles, corporelles, et caetera.
Tatiana [00:15:37]:
J’adore la distinction que tu fais entre quelque chose qui peut être peut-être perçu comme plus crédible, entre guillemets, bon, les sciences, psychologie, sexologie qui ont la terminologie, en « logie », et aussi le côté plus artistique, plus incarné, plus peut-être même intuitif jusqu’à un certain point. Certaines personnes vont dire comme « dans l’aspect plus féminin » entre guillemets, même si j’aime pas ces dichotomies nécessairement féminin/masculin, mais j’aime beaucoup cet aspect de l’art et aussi d’ouvrir que le plaisir, c’est charnel, mais pas nécessairement sexuel.
Sarah Zerbib [00:16:22]:
Exactement.
Tatiana [00:16:32]:
Une grosse distinction à faire qui sûrement tu dois faire souvent, j’imagine.
Sarah Zerbib [00:16:33]:
Énormément. C’est vrai que quand j’évolue dans des lieux ou des soirées, tu vois donc des fois où il n’y a rien à voir avec mon métier, mais que forcément les gens ils te demandent ce que tu fais dans la vie et dès lors que je parle de ça, limite j’ai une file qui se forme ou des groupes qui se forment autour de moi avec plein de questions parce que forcément tout ce qui touche à l’intime donc au corps ça anime, on se dit « j’ai quelqu’un sous la main qui pourrait peut-être répondre à une question donc je vais oser lui poser la question » et effectivement tu as vu juste avec cette idée de création, d’aspect créatif / artistique, en fait c’est… L’artistique a beaucoup ponctué mon parcours en tant que loisir, des fois même au niveau des études et en fait j’ai toujours cette photo de moi à 3-4 ans dans l’appartement où j’ai grandi en partie avec mes parents et où je leur tends… Donc il y a une photo de moi de la petite Sarah avec une assiette où j’ai fait une présentation avec 3-4 bricoles, donc un cake, des petits bonbons, des olives et tout et j’avais tout décoré, j’avais tout découpé d’une certaine manière et j’étais trop fière de mon apéritif et pour moi c’est là où la plaisirologie a commencé où il y a la petite Sarah qui s’est approprié 3-4 bricoles dans la cuisine qui a fait à sa sauce et qui donne à ses parents « mais regardez comment c’est trop beau vous allez vous régaler » ben j’ai l’impression que c’est cette petite Sarah qui aujourd’hui ben tu vois elle s’exprime, avec ses codes d’adulte, mais à travers l’univers qu’elle a créé.
Tatiana [00:18:21]:
C’est très très beau puis ça me touche comme histoire parce que j’ai l’impression… Aussi bon, j’ai l’impression que, étant moi aussi un enfant qui était très créatif et très proche de ses sens, il y a eu une… J’ai grandi éventuellement à comprendre qu’il fallait pas nécessairement leur faire confiance ou que les sens, des fois, se mettaient dans le chemin de notre ambition justement, qu’il fallait des fois être plus structuré, plus cognitif, plus cérébral dans notre façon de fonctionner, notamment au niveau professionnel. Puis personnellement, ça a créé beaucoup de… Mais bref, y compris le fait d’être femme, puis d’être née dans une société où il y a beaucoup d’hostilité envers les femmes. Mais il y a eu une déconnexion, dans ma vie à moi, avec le plaisir des sens que j’ai maintenue à travers une recherche plus intellectuelle comme étudier l’histoire de l’art, étudier la littérature, continuer à apprécier au niveau hobby certains arts, mais aussi plus je devenais la professionnelle dans un milieu corporatif whatever, plus on dirait qu’il y avait de moins en moins de place pour ça. Toi, comment ça a été ta relation avec le plaisir à travers les années? Puis est-ce qu’il y a eu comme justement une réappropriation ou pour toi, ça a quand même toujours été assez naturel et assez présent?
Sarah Zerbib [00:19:54]:
Je pense que ça a été naturel au début, un peu comme toi. Et puis après, il y a eu une vraie déconnexion, une vraie coupure. Je dirais que ça a commencé quand j’ai connu un peu de harcèlement scolaire, de choses un peu difficiles à l’école, parce que j’étais un peu la fille un petit peu ronde, un peu grosse, donc j’avais connu des moqueries, on se moquait de mon nom de famille, donc un peu d’antisémitisme, on a… Donc j’ai cherché à me protéger donc je me suis créé… Ce monde créatif est devenu plus un monde intérieur donc je le partageais plus du tout, je suis devenu un vrai garçon manqué c’est-à-dire que je suis passée d’une petite fille qui adorait mettre des robes qui tournent à des pantalons, des pulls et je ne jouais qu’avec des garçons, alors j’ai jamais trop aimé les jeux… Les poupées tout ça, donc j’étais plutôt dans les jeux, la balle aux prisonniers… Enfin bon plus des jeux avec les garçons et puis voilà je l’ai gardé intérieurement, et puis bon il y avait des choses un peu difficiles aussi au niveau familial, donc je pense que je me suis réfugiée plutôt dans ce monde-là à l’intérieur et puis il y a vraiment eu une cassure au moment de l’adolescence où mon corps a commencé à changer, donc où ce corps d’enfant devenait pubert, déjà que je n’étais pas très à l’aise dans mon corps puisque j’étais un peu grosse, – enfin grosse, voilà à l’époque je rentrais pas dans les standards ni maintenant non plus, mais voilà – j’étais très mal avec mon image, je percevais l’hypersexualisation déjà des femmes et il y avait plein de choses qui me donnaient envie de rejeter ce qui venait du corps, donc les sens.
Sarah Zerbib [00:21:57]:
Donc je me suis beaucoup réfugiée dans la peinture, l’écriture et la culture en général. Donc c’est pour ça que j’ai étudié un semestre d’histoire de l’art et ça m’a… Trop bien, à la fac. Et j’ai commencé à renouer avec mes sens quand j’ai voulu apaiser ma relation à la nourriture parce que j’ai connu l’hyperphagie, donc un trouble du comportement alimentaire associé à – alors trigger warning, j’ai pas de problème à en parler, mais si les personnes qui ont du mal avec les agressions sexuelles peut-être peuvent couper là – avec un vécu incestuel, donc ça plus ça a fait que je protégeais mon corps, donc il y avait des couches de kilos de kilos de kilos, finalement pour le rendre moins sensible et moins désirable et en fait la nourriture venait à la fois apaiser quelque chose, donc j’avais des crises d’hyperphagie sur beaucoup d’aliments sucrés, donc le côté doux doudou, et quand j’ai commencé à vouloir apaiser ça – et en fait une photo d’identité a été un déclic où je me suis dit « non je peux pas ressembler à ça, c’est pas la Sarah que je sais exister à l’intérieur », le fait de ne plus sentir les sensations de faim… Je ne faisais plus du tout confiance à mon corps et en commençant ce cheminement avec l’alimentation ça a été ma porte de redécouverte de mon corps donc il y a eu ça et puis en parallèle le blogging, notamment beauté, qui au bout d’un moment m’a amenée à me filmer, m’a amenée à prendre des photos et le fait d’être en lien, et d’être un peu forcée à regarder mon image, à voir aussi l’évolution de mon image, a fait que j’ai commencé à explorer cette relation au plaisir à mes sens et donc à mon identité, donc je suis passée par différentes phases jusqu’à arriver à une phase, je dirais qui a commencé à vraiment se dessiner il y a 5-6 ans, qui se rapproche beaucoup plus de la Sarah que tu vois aujourd’hui donc en termes d’image de soi, de relation à son corps, d’apparence, où je me sens bien tu vois, je ne sens plus de tension, je ne sens plus que j’ai besoin d’en faire trop pour me sentir femme. Alors pour certaines personnes peut-être l’image c’est trop pour elle, mais par rapport à comment je me maquillais y’a 10 ans, c’est 3 fois moins de maquillage, enfin… Donc vraiment il y a eu des phases donc l’alimentation, le blogging et la dernière case qui m’a énormément aidée, c’est la danse et notamment la danse latine où tu danses en couple et donc tu te fais toucher, mais quand tu danses en couple tu as un vrai cadre les mains sont censées aller à certains endroits, mais en fait ça a été aussi une très grande étape pour me réapproprier mon corps, me sentir en sécurité avec mon corps quand quelqu’un le touchait et quinze ans plus tard je fais toujours de la danse et ça fait partie de moi et je n’imagine pas ma vie sans la danse parce que, au-delà du lieu de la relation à mon corps, c’est venu affiner énormément de choses en termes de sensorialité et il y a beaucoup de parallèles que je fais avec mes clientes entre des choses que j’ai capté à la danse mais qui s’applique aussi à la vie intime. Et pour moi, c’est un vrai terrain de jeu quoi. Et je m’en inspire beaucoup de cette expérience personnelle.
Tatiana [00:25:41]:
Waouh, merci pour tout ça. C’est vraiment riche et je me reconnais dans plusieurs parties aussi de ton histoire, dont la déconnexion initiale en tant que femme dans justement ces environnements où on ne se sent pas en sécurité. Est-ce que pour toi, étudier la psycho puis la sexo, c’est venu en parallèle ou… Pourquoi l’avoir rendu tellement central dans ton éducation? Est-ce que c’était quelque chose que tu voulais faire plus à temps plein, mais sous une forme plus, disons, crédibilisée par rapport à d’autres voix?
Sarah Zerbib [00:26:35]:
Alors c’est assez drôle cette question parce que je n’étais pas du tout destinée à faire ces études. En fait, moi j’étais d’abord attirée par le côté archéologie, donc comme beaucoup d’enfants, mais j’avais une vraie soif d’apprendre l’histoire et je trouvais ça beau en fait de trouver des trésors dans la terre tu vois et après j’ai vraiment voulu aller en design donc vraiment le côté très créatif et en fait donc j’avais envoyé une candidature dans une école bien spécifique, à Toulouse à l’époque puisqu’on était dans le sud avec ma famille et exceptionnellement cette année, ils ont accepté deux redoublants et j’étais deuxième sur liste d’attente. Le truc improbable donc forcément très déçue et je finis non pas dans une école professionnelle pour le design, mais dans un lycée général donc dans un cursus général mais avec une option art plastique. Donc un peu dans un cursus finalement assez littéraire dans ma première année de lycée et avec le côté arts plastiques où je bricolais pas mal et en fait comme je n’avais pas été acceptée dans cette école je ne savais plus du tout quoi faire de ma vie, j’avais quinze ans, j’étais là « mais mon plan A n’a pas marché, quel est le plan B quoi ? Je ne sais pas ». Donc je suis passée par plein de phases où je me suis demandé, bon « est-ce que j’aime écrire? Est-ce que je vais faire du journalisme? » mais je n’avais pas envie de faire des prépas, parce qu’en fait j’ai commencé à être en échec scolaire au lycée je trouvais pas ma place je me sentais pas bien c’était très compliqué au niveau familial donc c’est un peu le pic de mon mal-être, de mes TCA, de ce contexte incestuel et caetera et bon comme entre la seconde et la première tu dois faire un choix de « est-ce que tu vas en littéraire, en scientifique ou en économique? », j’ai un peu suivi l’adage qui dit « bon va en scientifique ça t’ouvre plus de portes ». Comme j’étais plus dans une seconde littéraire, j’avais une très bonne prof de français qui m’a fait renouer avec les cours de français, alors elle était dure mais très juste elle m’a beaucoup encouragée, c’était vraiment une prof un peu à l’ancienne, mais que j’ai beaucoup aimé et après je suis tombée sur des profs en première beaucoup plus scientifique et j’avais plus trop le niveau finalement on avait moins fait de choses dans le programme donc j’étais un peu à la traîne, ça commençait à être compliqué, j’avais plus envie de m’investir en cours je trouvais même pas ma place j’avais à nouveau une très bonne prof de français qui une fois à la fin du cours m’a dit… Elle voulait lire ma copie devant tout le monde je lui ai fait « non », je voulais pas que mes camarades sachent ce que je pensais et elle m’a juste pris en fin de compte en me disant « Sarah vous devriez penser à écrire, vous avez des choses à dire », donc ça m’a accompagnée depuis et je la remercie et en fait en dernière année de lycée quand j’ai fait mes cours de philo on parlait de psychanalyse psychologie je me suis dit « ça ça me plaît je pense que je pourrais m’épanouir là-dedans », donc je suis partie en psycho et l’aspect plus intime sexo je pense que je m’y suis intéressée très très jeune, je pense dès toute petite avec mes premiers comportements masturbatoires sans que je m’en rende compte, bref l’exploration du corps d’un enfant, et puis après plus tard donc à cette période du lycée, il y avait un sous-sol dans la maison de mes parents, il y avait une grande bibliothèque je suis tombée sur certains livres, donc une encyclopédie, donc tout ce qu’il y a de plus médical, qui parlait de l’appareil reproducteur, mais avec des photos, c’était des années 70 donc il n’y avait pas de censure, on voyait les corps masculins, féminins, donc moi je voyais les zones pubiennes pour la première fois à l’âge adulte tout ça, je suis tombée sur des BD aussi érotiques, bon un peu osée pour une ado de 15-16 ans, mais qui m’ont interrogée, parce que « oh lala, c’est sexy je suis pas d’accord avec ça », alors que j’avais jamais rien fait, mais je me suis dit « non ça va pas ce que je suis en train de lire » et puis après j’ai commencé – donc comme ma prof de français m’avait invitée à écrire et que moi j’étais l’ado qui pensait qu’elle allait jamais avoir de petits copains, qu’elle rien n’allait aller dans sa vie sentimentale – j’ai commencé à écrire des fanfictions sentimentales, empreintes d’érotisme et donc mine de rien ça a commencé à faire partie de mon environnement, je lisais ces fictions sur internet et finalement voilà je suis allée en psychologie, alors on me dit « pourquoi tu n’as pas fait de sexologie? », mais en fait finalement la sexologie, c’est pas tant ce que je travaille avec mes clientes aujourd’hui, ce que je travaille, c’est vraiment plus la relation au corps, aux sens, au plaisir, à créer un espace safe pour cette exploration, donc bien sûr que je me suis formée, j’ai fait des choses complémentaires en termes de sexologie, mais je veux pas être sexologue. Donc voilà quelle est la différence.
Tatiana [00:31:44]:
Oui, puis je pense que c’est une différence vraiment essentielle. T’as utilisé le terme « intimité » à plusieurs reprises, puis je pense que, encore une fois, on fait beaucoup de raccourcis entre le travail dans le coaching en intimité ou ce genre de travail là et le bien-être sexuel et la sexologie, même s’ils vont probablement se retoucher sur certains domaines. L’intimité, c’est un peu plus que tu… De la façon que je le comprends du moins, puis tu me diras si c’est comme ça que tu le vois, mais c’est cette sécurité que tu crées avec toi-même, avec tes sens, avec ton corps pour ensuite créer d’autres espaces sécuritaires à expérimenter avec les autres.
Sarah Zerbib [00:32:31]:
Exactement, exactement, c’est vrai que je le travaille tout le temps avec mes clientes parce que… Alors c’est vrai qu’en France, je sais pas… Je vais parler de la France parce que je ne sais pas comment ça se passe au Canada ou en Amérique du Nord. Déjà la sexologie, c’est encore très tabou et imaginer quelqu’un qui te coach dans ton intimité, c’est genre « mais ça n’existe pas une coach en intimité », ça n’existe pas en France. Donc déjà on part de là et c’est vrai que souvent la porte d’entrée de « je cherche quelqu’un », c’est « parce que j’ai un problème, je ne ressens plus assez de plaisir, j’ai plus de désir, j’ai plus ceci, j’ai pas cela » et il y a toujours une phrase – et tu me l’as ôtée de la bouche – c’est le fait de devenir d’abord intime avec soi pour pouvoir inviter l’autre à être intime aussi avec soi. Et je pense qu’il y a un énorme travail à faire chez les femmes – et bon chez les hommes aussi, mais là je m’intéresse aux femmes – de créer de l’intimité avec elles-mêmes que ça soit leur corps, leurs sens, leur image, mais à toutes les dimensions, tous les étages, parce que c’est ça qui permet de se sentir en confiance avec soi-même. Ça ne veut pas dire qu’on n’a pas de complexe, souvent je dis on arrive à un état où on est suffisamment en confiance, donc ce qui permet d’avancer et donc de créer un espace sécuritaire où on va pouvoir se laisser aller aux sensations et donc au plaisir.
Tatiana [00:34:10]:
Oui, puis ça mène à une question que j’avais justement parce que je pense que aussi comment j’entends beaucoup de conversations autour du plaisir, c’est très lié au confort. Puis je pense que les gens font l’association entre les deux, mais qu’il y a des nuances probablement à faire entre, chercher ce qui est confortable versus chercher ce qui procure du plaisir. Puis même au niveau entrepreneurial, tu sais, c’est vraiment intéressant parce que, moi je coach plus au niveau professionnel puis au niveau entrepreneurial, mais le plaisir a une énorme place dans ce qu’on s’autorise aussi à faire, même au niveau professionnel, dans les identités qu’on s’autorise à avoir. Et le fait d’avoir cette dichotomie où il y a d’un côté le confort et de l’autre côté l’inconfort, d’un côté le plaisir, d’un côté le non plaisir, ça fait que souvent, je vais voir des personnes qui vont choisir des avenues qui ne sont pas nécessairement… Tu sais, ils vont peut être choisir une avenue qui va sembler confortable pour le moment, mais qui, ultimement, va limiter les accès aux plaisirs possibles qu’elles peuvent avoir. Bref, là, je ne veux pas trop compliquer la question, mais je me demandais comment… Si toi c’est quelque chose que tu remarques aussi entre ces deux concepts-là ou comment tu le vois là cette question-là du confort versus du plaisir?
Sarah Zerbib [00:35:40]:
Oui je suis tout à fait d’accord avec toi, on est dans une vraie dichotomie alors que pour moi on peut ressentir du plaisir alors qu’on est dans une posture inconfortable. Je veux dire des fois tu peux être amenée… Je sais pas, je prends l’exemple de parler en public, ça te stresse, mais tu es tellement contente de parler d’un sujet qui t’anime que tu vas prendre méga plaisir, mais peut-être tu as les mains moites, tu as le cœur qui bat à fond et l’un n’empêche pas l’autre et je pense qu’on est trop dans l’exclusion de « c’est ça ou ça », plaisir versus déplaisir, alors que tout est lié tu vois, c’est comme, si je prends un exemple dans la sexualité, dans le côté charnel entre ce qui fait du bien et ce qui fait mal, des fois il n’y a pas grand-chose, tu vois en termes d’intensité ou de position ou de voilà de durée, parfois on peut vite basculer dans l’un l’autre, mais ça veut pas dire que quand on bascule il n’y a plus du tout de plaisir, il peut y avoir une autre forme de plaisir auquel on ne s’attendait pas, et je pense que le plaisir, il est aussi constitutif de la découverte. Je veux dire, il n’y a pas longtemps, j’ai mangé pour la première fois du caviar, moi j’aime pas du tout les œufs de poissons, c’est vraiment pas du tout mon délire, et bon je voulais quand même faire honneur à ce super repas et donc j’ai pris genre deux grains j’étais là « oh lala la honte » et donc j’essaye de voir, bon est-ce que ça a le goût d’iode, de poisson et en fait ça a un goût de noisette et je me suis dit « waouh la texture et tout » et je pense que le plaisir est aussi dans cet émerveillement de s’autoriser à découvrir des nouvelles choses qui peuvent nous sembler en dehors de notre zone de confort, mais même si j’aime pas « est-ce que j’ai quand même pris plaisir à la découverte ? ». Il y a des choses finalement, on va pas aimer mais est-ce que le processus d’exploration m’a amusé, m’a permis d’apprendre quelque chose, m’a… Ouais m’a fait avancer dans la connaissance que j’ai de moi.
Tatiana [00:37:51]:
Ouais pis ça mène à ce qu’on disait tantôt sur la créativité, puis l’espace créatif, puis la plaisirologie comme art, parce que, même dans n’importe quelle pratique artistique, on a les moments où bon, je n’ai pas envie de pratiquer mes gammes, où je n’ai pas envie de faire des tests de couleurs ou peu importe, mais que ultimement, quand on regarde le chemin vers la maîtrise ou ce que ça nous procure dans la grande expérience, on a beaucoup plus de nuances et de complexité dans ce qu’on vit. Puis j’adore cette notion d’émerveillement et d’enchantement parce qu’il y a quelque chose aussi dans suspendre le jugement pour pouvoir s’autoriser le plaisir ou pour pouvoir s’autoriser des expériences où le plaisir serait possible.
Sarah Zerbib [00:38:35]:
J’aime bien l’expression, c’est plus en anglais que je trouve qu’elle sonne bien, mais bon elle peut sonner bien en français, c’est « the art of noticing », donc l’art de repérer. Et c’est d’aller – et c’est ça aussi qui me plaît dans la plaisirologie – c’est d’aller chercher ce qui est beau, tu vois. Peut-être c’est pas beau de prime abord – tu vois ça peut être un bourrelet, une vergeture, si on parle du corps ou autre – et en fait peut-être selon cette lumière, selon avec tel tissu qui le dévoile, avec peut-être une huile que j’ai appliquée sur mon corps etc, en fait je vais me laisser émouvoir et je me dis « en fait si c’est beau, il y a de la beauté dans cette partie peut-être de mon corps que je n’aime pas ou qui me met peut-être pas à l’aise parce que voilà ça me rappelle telle histoire ou telle partie de ma vie, mais en fait, je peux voir sa beauté ».
Tatiana [00:39:51]:
Oui, la beauté. J’avais enregistré un épisode qui disait « est-ce que la beauté a de la place dans nos entreprises? ».
Sarah Zerbib [00:39:50]:
Grande question.
Tatiana [00:40:56]:
Grande question, mais je pense qu’on est probablement alignées sur la direction dans laquelle on amènerait ça. C’est dommage qu’on la considère tellement accessoire parfois dans nos vies ou qu’on la minimise dans ce que ça peut avoir comme effet transformateur.
Sarah Zerbib [00:41:21]:
J’ai appris quelque chose, je crois que c’était l’an dernier, et en fait ça a fait tellement de sens pourquoi le côté beau ou esthétique en parlant de l’apparence était considéré comme superficiel et ça vient du siècle des Lumières où il y a eu un shift total dans la manière de se présenter parce que ce qui était important c’était la pensée, la lumière dans les pensées et finalement ça a amené une sorte d’austérité vestimentaire pour mettre en avant la pensée et quelqu’un qui aurait voulu exprimer des choses d’elle ou de lui à travers son apparence, ça a commencé à être dévalorisé à cette époque alors qu’il y a énormément de cultures, même dans l’antiquité, où il y avait des rituels esthétiques donc qui touchait le corps, l’apparence qui était considéré comme étant une élévation de l’âme et je me dis « waouh tout fait sens, tout fait sens ».
Tatiana [00:42:23]:
J’en ai des frissons. Puis aussi, j’aime… En tout cas, j’adore l’univers que tu as créé, le fait d’avoir comme justement ce blog beauté d’avoir ce côté… En plus, t’as appelé ton entreprise « Âme Fauve », puis pour quelqu’un qui a étudié en histoire de l’art, les fauves, c’était un mouvement que j’aimais beaucoup parce qu’il y avait cette…
Sarah Zerbib [00:42:21]:
Ah, je suis pas au courant!
Tatiana [00:42:16]:
Mais bref, tu iras regarder les fauvistes, qui ils étaient là.
Sarah Zerbib [00:42:16]:
Ah oui les fauvistes!
Tatiana [00:45:49]:
Ils ont cette relation aussi avec la couleur et avec l’intensité de la couleur, qui est très forte pour les sens justement. Mais bref, ça, c’est comme on diverge dans un autre sujet. Quand tu travailles avec tes clientes, genre parce que tu travailles avec des femmes en priorité, c’est quoi la première étape pour toi quand tu vois que… Ben premièrement disons c’est quoi l’étape où elles déterminent qu’elles ont besoin de travailler leur relation au plaisir? Qu’est-ce que tu as identifié comme étant ces points tournant dans leur vie? Et ouais, voilà.
Sarah Zerbib [00:46:34]:
C’est qu’en général, alors il y a un peu trois grandes catégories de personnes qui viennent me voir spontanément – enfin spontanément ou après avoir vu mes posts sur les réseaux ou ailleurs – il y a les personnes qui ne ressentent pas ou plus ou n’ont jamais ressenti de plaisir intime et veulent un peu absolument arriver à l’orgasme, donc c’est encore dans la sexualité de performance comme je l’appelle, mais se disent un peu « je passe à côté de sans doute quelque chose de sympa et j’aimerais bien y arriver », donc après c’est déconstruire cette partie de la performance pour vraiment aller à la rencontre de son plaisir, et donc c’est assez intriqué avec sa relation au corps, donc il y a beaucoup de choses autour du contrôle, le fait de se passer en dernière, voilà de plutôt penser aux autres, d’avoir une vie très cadrée dans les clous, tu vois l’avenue, comme tu parlais, qui semble confortable, mais finalement « est-ce que je me suis vraiment écoutée, est-ce que j’étais fidèle à moi-même, est-ce que je me suis laissée de l’espace pour exister, m’exprimer etc? ». Il y a une catégorie de personnes qui viennent, notamment des personnes assez jeunes donc aux alentours de 25 ans, donc assez jeunes, qui se posent pas mal de questions que ça soit en termes de « est-ce que je suis normale? Ou alors j’ai envie de entre guillemets de poser des bases, des bonnes fondations pour ma vie intime et j’ai pas envie de le faire seule et l’univers de Sarah m’a parlé donc je vais faire appel à Sarah » et il y a une troisième catégorie de personnes qui ont tendance à me voir et là plutôt viennent en couple, même s’il y a quand même un sujet plus du côté de la femme, c’est en post-partum donc aux 2-3 ans de l’enfant, que ce soit le premier ou le second, une fois que vraiment la partie bébé a commencé à se calmer et que le couple, papa-maman se disent « ok là on s’est familiarisé avec notre identité de papa maman, mais l’homme et la femme ils sont où? On s’est éloignés, on ne se retrouve plus ». Il y a des maris entre guillemets frustrés, qui ont envie de s’approcher de leur femme, mais qui savent plus s’y prendre, la femme en fonction de comment elle a vécu l’accouchement, quelle a été / quelle est la relation à son corps, à son plaisir, va plus ou moins ouvrir ou pas la porte, donc je dirais que c’est un peu les états de départ que je rencontre, donc je dirais que la première étape c’est vraiment à sortir du jugement et de la culpabilité et créer un premier soulagement. Donc je dirais que c’est… On dépose l’armure, on dépose les bagages et on commence à souffler, on commence à respirer. Je dirais que c’est vraiment les premières étapes.
Tatiana [00:47:55]:
Fait que c’est ça, autant quelqu’un qui est investi déjà dans une relation que quelqu’un qui veut créer un peu plus de cette intimité avec soi-même. Ouais, puis ce que je trouve bien aussi, c’est que j’imagine que ces personnes-là, elles peuvent ensuite voir les effets de ce travail sur leur façon aussi d’être parents ou d’être avec d’autres collègues, tu sais dans le sens, la relation qu’on travaille avec notre propre plaisir a aussi un effet sur les autres relations qu’on entretient avec autrui.
Sarah Zerbib [00:49:15]:
Totalement. Par exemple là j’ai fini avec une cliente, à la base elle venait parce que elle pensait qu’elle ne saurait jamais orgasmer et elle m’a dit quelque chose de très beau aussi aujourd’hui où elle m’a dit « sans vous – bon elle me vouvoit, elle garde le vouvoiement – sans vous Sarah, j’aurais jamais non plus appris à communiquer », donc en fait la communication pour le plaisir est super importante sur plein de niveaux, que ça soit avec soi-même, avec l’autre, et elle qui venait à la base pour un problème de, je sais pas orgasmer, on est venu travailler beaucoup plus en nuance dans les relations, dans prendre sa place, se sentir en sécurité avec son corps comme je l’exprimais, l’explorer, découvrir aussi son… Ce que moi j’ai créé donc des langages érotiques, donc son langage érotique qui aujourd’hui l’a fait naviguer plus sereinement dans sa vie intime, mais là on touche le sujet par exemple des relations amicales qui sont aussi un vrai sujet et où ces concepts que je travaille s’actualisent aussi dans d’autres domaines de vie, enfin dans d’autres secteurs de nos vies.
Tatiana [00:51:13]:
Il y a tellement de choses que j’aimerais approfondir avec toi, notamment le lien entre plaisir, performance, parce que dans mon historique personnel, ça a été vraiment ça la grande déconstruction, c’était de voir que ma vie n’est pas nécessairement au service de la performance, mais aussi elle peut être dans ce plaisir sans « sens » entre guillemets, dans le sens – j’utilise le mot « sens » tellement de fois – mais un plaisir qui a pas d’utilité autre que pour moi-même. Puis j’avais lu un livre, je me rappelle plus si c’était dans Pussy de Mama Gina, mais où elle disait qu’il y a tellement de terminaisons nerveuses dans les organes génitaux féminins que c’est un des plus beaux cadeaux qui sont faits à la femme. Et de se le réapproprier, c’est aussi réintégrer la beauté et l’abondance que le monde a à nous offrir. Puis je trouvais qu’il y avait vraiment une beauté dans ce lien entre notre corps, le plaisir, le monde et tout ce qui nous entoure, tu sais vraiment un côté très connecteur de cette habileté au plaisir.
Sarah Zerbib [00:51:27]:
Même au-delà des appareils génitaux, personnellement je suis fascinée par l’organe de la peau et la peau c’est vraiment cette frontière entre ce qui est à l’intérieur de mon corps et ce qui est à l’extérieur de mon corps et ce qui me fascine – tu vois là on parle des terminaisons du clitoris – mais sur chaque bout de doigt il y en a deux mille et je me dis « mais le nombre de possibilités! » et finalement quand on était bébé, on a appris le monde avec nos sens et par exemple juste avec le bout des doigts, on touche quelque chose en fermant les yeux on sait si c’est chaud, si c’est froid, quelle est la matière dans laquelle c’est fait. Donc on a une… Enfin moi ça me fait exploser mon cerveau à chaque fois, je me dis « on a un répertoire, une connaissance au bout des doigts, une expérience à aller chercher et on s’en prive quoi ». Enfin, c’est pas qu’on s’en prive consciemment, mais je me dis mais « ah mais on a tellement de choses à faire, à explorer! », ne serait-ce que tu vois des fois je donne des exemples très très bateaux, mais au moment de la douche, quand on met un vêtement, c’est des choses du quotidien, mais on s’en rend même plus compte parce qu’on est tellement dans nos têtes, il faut que ça aille vite etc, et je me dis « mais moi j’ai envie de sentir le gel douche qui coule sur mon corps, j’aime sentir l’eau » et bien sûr qu’on est prises, et moi aussi, dans le quotidien, mais juste tu prends dix secondes, tu respires et tu te concentres sur ce qui se passe sur ta peau et je me dis « mais c’est tellement beau d’avoir eu ce cadeau de la nature, on a cet organe qui fait la frontière, qui nous permet de ressentir, nous émouvoir et elle demande qu’à être cultivée », tu vois. Enfin moi ça me… C’est trop beau quoi.
Tatiana [00:52:06]:
J’adore! Sarah c’est le moment où on doit terminer cette conversation, dis-nous où on peut te suivre, c’est quoi tes plateformes préférées pour rester en contact?
Sarah Zerbib [00:52:21]:
Alors mes plateformes préférées : je suis présente j’ai envie de dire partout, mais vraiment pour avoir un bon sens de la plaisirologie, c’est Instagram donc @amefauve, je suis aussi très présente sur YouTube, donc chaque semaine je crée des contenus autour des relations, de la sexo tout simplement, du plaisir intime, j’ai un podcast également, le blog Âme Fauve, TikTok pour le côté coulisses, lifestyle, ma vie un peu perso si ça vous intéresse. Et puis et puis voilà, c’est déjà pas mal.
Tatiana [00:52:25]:
C’est déjà pas mal. On va mettre tous les liens dans les notes de cet épisode et je te remercie infiniment d’être venue nous partager cet art, cette vision aussi du monde et j’espère qu’on aura la chance de se reparler.
Sarah Zerbib [00:52:56]:
J’espère aussi merci beaucoup Tatiana.
Tatiana [00:52:26]:
Merci. Hey tu es encore là? ça veut dire que l’épisode t’a plu, c’est vraiment cool ça! Est-ce que je peux te demander quelque chose maintenant? Aide d’autres femmes comme toi à découvrir le podcast en déposant des étoiles d’appréciation pour l’Ambition au Féminin. Sur Apple Podcasts, c’est facile : défile tout en bas de la page de l’émission où tu vois les avis et tape sur le cinq étoiles pour faire exploser mon cœur de joie. Sur Spotify, c’est encore plus simple : navigue sur la page du balado et tape l’icône en étoile en bas de la description. Merci d’avance, je t’apprécie beaucoup.