Ep. 163 Féminisme, capitalisme et entrepreneuriat peuvent-ils faire bon ménage?

Les plus observateurs d’entre vous auront sûrement remarqué que bien que je parle souvent de systèmes d’oppression, de patriarcat, de richesse et de pouvoir, il y a un mot que je n’utilise pas souvent dans mes réflexions : le capitalisme.
Une partie de moi évite le terme parce qu’en tant qu’ancienne étudiante de philosophie continentale et des cultures slaves (j’en ai lu des compte-rendus de goulags et de reconstruction post-bolshévique), j’ai une compréhension plutôt tendue des forces idéologiques qui soutiennent le capitalisme et ses contraires.
 
Et l’autre partie de moi n’en parle pas parce que j’ai été plusieurs fois ouvertement critiquée pour mes positions “de droite” (leurs mots) quand je réfléchissais à voix haute sur des sujets comme l’argent, le luxe et la richesse.
(Dans les sphères dans lesquelles j’évolue, c’est à peine si c’est l’équivalent de prendre le thé avec Jeff Bezos, voter pour Donald Trump et héberger une horde vampires mangeurs de nouveaux-nés dans mon sous-sol.)
 
Bref, c’est une façon compliquée de dire que c’est un sujet que je trouve hyper complexe et pour lequel je déplore trop souvent les analyses superficielles et incendiaires qui utilisent le manteau de la soi-disant moralité pour jeter de la haine gratuite à d’autres femmes entrepreneures.
 
CECI DIT.
 
Je me vois aussi comme une chercheure sur l’ambition chez les femmes et je réfléchis constamment à la question : “Est-ce que tout entrepreneuriat – parce que basé dans un système capitaliste – est fondamentalement abusif?”.
C’est notamment une des questions à laquelle j’ai été confrontée alors que je rédigeais mes propositions de recherche doctorale. Et pour être 100% honnête, j’y réfléchis encore, car je n’ai pas de réponse qui me satisfasse.
Aujourd’hui, j’avais quand même envie de te partager quelques-unes de mes croyances qui nourriront peut-être tes propres réflexions sur le sujet.
 
Mais avant de commencer!… je veux m’assurer que tu as bien vu qu’il est encore possible de regarder le replay de ma masterclass gratuite qui s’appelle : Apprendre à danser avec le chaos entrepreneurial… sans surcharger ton système nerveux ou faire de ta croissance un événement traumatique
Pour accéder à l’enregistrement, tout ce que tu as à faire est de remplir le formulaire de candidature pour Autopoiesis. Ça va te prendre 3 min max et ça a comme seul objectif d’apprendre à te connaître un peu et voir si le travail que je propose via ce programme est adapté à là où tu veux aller avec ton entreprise dans les prochaines années.
 
Si tu penses que ça peut potentiellement t’intéresser, candidate pour que je t’envoie le lien pour visionner le replay avant que ça expire. Pas plus compliqué que ça.
 
 
Bon, maintenant retournons au capitalisme et à l’entrepreneuriat…
Voici quelques raisons pourquoi je n’arrive pas [encore] à adhérer au discours anti-capitaliste.
 
RAISON #1 : L’anti-capitalisme n’existe que dans le framework de pensée du capitalisme… et je ne veux pas rester prisonnière de cette vision du monde.
L’une des caractéristiques du capitalisme, c’est sa capacité à absorber toute idéologie, tout mouvement, toute résistance, et de l’exploiter pour son propre avantage. Pense à la profusion des t-shirts de Che Guevara ou à l’industrie de l’imagerie nostalgique de la Russie de Staline. L’ironie est la gasoline du capitalisme. ⛽
 
L’anti-capitalisme de par son nom même se définit comme un mouvement réactionnaire (anti-) qui existe uniquement comme négation de son grand frère (-capitalisme). Le premier existe dans le contexte du second.
Et même si la condamnation d’un système basé dans la violence et l’exploitation est une noble cause, fonder une idéologie socioéconomique sur la négation de quelque chose de fondamentalement problématique nous met dans une position de pure réactivité.
Un genre de Noir/Blanc dans lequel on offre pas une alternative qui sort du cadre même de la réflexion capitaliste.
Et selon moi, dans la réactivité, il n’y a pas de créativité.
 
Voilà probablement la plus grande critique que je fais du discours anti-capitaliste : son manque d’imagination.
 
RAISON #2 : Le discours anti-capitaliste sous-tend trop souvent une position de privilège ancré dans la culpabilité occidentale.
Et ici, je vais parler plus spécifiquement de l’anti-capitalisme qui démonise l’argent, la richesse et la propriété privée dans les mains de monsieur et madame tout le monde.
 
Le socialisme, le communisme et autres idéaux anti-capitalistes sont fun à envisager quand t’as 19 ans et que t’as envie d’essayer la vie de bohème avec tes 2 colocs’ dans ton appart mal décoré que ton papa comptable t’a déniché dans le quartier le plus hip de la ville (fait vécu).
Mais je te garantis que si tu parles à une Serbe, une Haïtienne ou une Sud-Coréenne des bienfaits d’un régime proto-communiste et de l’immoralité d’accumuler des biens au-delà de ce qui est “socialement” acceptable, tu vas te faire donner une leçon d’histoire assez vite.
 
Perso, je suis la première génération d’une lignée qui a réussi à s’extirper d’une extrême pauvreté. Ma mère vient d’un pays machiste qui a littéralement fait faillite (l’Argentine) et a grandi avec une mère divorcée monoparentale qui a dû utiliser toute sa débrouillardise pour faire vivre ses 3 enfants. Mon père est victime des orphelinats catholiques dans la période noire de Duplessis dans le Québec des années 40. La précarité financière fait partie de nos traumas intergénérationnels. La recherche de sécurité, de stabilité et de richesse est un mécanisme naturel de survie.
Se sentir coupable de nos privilèges ne nous donne pas la supériorité morale de juger qui que ce soit d’aspirer à tirer son épingle d’un jeu biaisé et violent.
 
RAISON #3 : Je préfère combattre le patriarcat, l’extraction et l’entrepreneuriat oppressif, plutôt que la richesse.
Bien entendu, j’aimerais vivre dans un monde où les ressources sont distribuées équitablement. Mais notre obsession de l’hyper-croissance, l’entitlement de l’Humain au-delà de la Nature et notre déconnexion profonde à notre spiritualité ont créé un littéral déficit planétaire.
En tant que citoyenne privilégiée de l’Occident, je considère avoir une obligation morale de déconstruire ces modèles de concevoir le monde. Cette déconstruction a lieu au sein de mon entreprise, mais aussi dans ma vie personnelle et mes schémas de pensée.
 
C’est notamment pourquoi je vois l’entrepreneuriat comme un geste féministe. Il nous permet de changer les dynamiques que l’on entretient avec notre environnement, avec notre histoire et avec nos communautés… idéalement pour le mieux.
(En passant, voici deux livres qui m’ont beaucoup aidé à cheminer ces derniers temps : True Wealth de l’économiste américaine Juliet B. Schor et Braiding Sweetgrass de la botaniste Potawatomi Robin Wall Kimmerer).
 
Malgré cela, je n’ai jamais eu le besoin de démoniser l’argent pour changer les paradigmes, car selon ma vision des choses, l’argent est une façon abstraite de participer à un acte d’échange, acte moralement neutre à la base de nos interactions humaines.
Pour ce qui est de la richesse, elle est présente partout autour de nous; suffit de la remarquer. On peut en être garante momentanément et ensuite la redonner, la redistribuer et la faire circuler.
 
Et tu sais quoi? C’est ce qui se passe quand les femmes accèdent à plus d’argent : elles la font circuler. C’est un fait documenté. Selon toutes les recherches sérieuses qui ont été faites sur le sujet, quand les femmes sont en position de richesse, elles font circuler le profit dans leurs familles, leurs communautés, etc. Bref, elles améliorent la situation de ceux et celles qui les entourent.
Le problème n’est donc pas l’outil (l’argent) ou le résultat (la richesse), mais bien de bloquer cette circulation.
 
RAISON #4 : Je me méfie de toute injonction de moralité perfectionniste.
Bon, ceci est plus une opinion qu’une raison, mais je pense réellement que beaucoup d’entrepreneurs anticapitalistes ont de la difficulté à réconcilier leurs désirs matériels et spirituels de vivre bien. Cette tension se manifeste par une position moralisatrice qui me rappelle beaucoup trop l’oppression qu’on met sur les femmes “d’être des bonnes petites filles parfaites”.
Et quand je vois ce mal-être, j’ai de la misère à me dire : oui, c’est comme ça que tout le monde devrait penser et se sentir. Au contraire, ça me fait plutôt me questionner à qui bénéficie de cette confusion? ????
95% du temps, la réponse est évidente : le patriarcat.
 
La honte est l’arme préférée de l’oppression. Dès qu’elle se pointe le nez, j’ai un gros red flag qui se lève.
Donc quoi de mieux que de créer une honte profonde autour de l’argent chez les femmes pour pouvoir maintenir en place les systèmes de pouvoir actuels… n’est-il pas coquin?
Moi ce que je veux c’est de voir plus de femmes en position de pouvoir, parce qu’encore une fois, c’est documenté que quand les femmes prennent la tête d’entreprises, qu’elles accumulent de la richesse et qu’elles participent activement aux prises de décision… les communautés qui les entourent en BÉNÉFICIENT DAVANTAGE.
 
Donc si on arrêtait de pointer du doigt celles qui se fraient un chemin vers ce leadership et qu’on les encourageait plutôt à continuer à s’élever jusqu’à ce qu’elles soient en mesure de transformer, elles aussi, le tissus économique et social?
Rallions-nous contre les Musk, Zuckerberg et autres oligarques de ce monde et laissons tranquille la petite entrepreneure qui a réussi à faire son 500 000$ cette année, brisé un cycle de pauvreté intergénérationnel et profité pour payer à sa famille un voyage de luxe à Bali, ok?
 
Ouf! Fallait que ça sorte…
Bon, naturellement, j’ai beaucoup plus à dire sur le sujet (et avec beaucoup plus de nuance).
Comme expliqué, c’est une réflexion qui est encore activement en cours. En fait, je suis si sérieuse dans la réflexion que je désire passer les 5 prochaines années de ma vie à faire de la recherche là-dessus. Mais voici où j’en suis.
Bien entendu, il n’y a pas de réponse facile… mais éventuellement, on a pas le choix que de se positionner.
Et si on veut revenir au concret de la business, je pense que ce type de réflexion est d’autant plus cruciale au moment où, collectivement, on commence à se questionner sérieusement sur nos modèles de créer et maintenir des entreprises oppressives.
 
Si c’est le genre de question qui t’habite, un des piliers sur lesquels on va se pencher dans Autopoiesis dans les prochains mois est comment établir notre propre éthique de profit.
Parce qu’à la fin de la journée, ta façon d’entreprendre est un sujet qui se déclinera entre toi et ta conscience.
Le but, comme toujours, c’est d’être consciente, intentionnelle.
Parce qu’une conscience ignorée peut rapidement se transformer en saboteur destructeur.
 
Alright, FNAME.
C’est tout ce que j’avais pour toi aujourd’hui.
N’oublie pas d’envoyer ta candidature pour Autopoiesis. Le replay de la masterclass expire bientôt et ça serait plate que tu passes à côté.
Bon weekend ☀️
Tatiana

Mentionné dans cet épisode :

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Transcription de l’épisode 163

Ep. 163 Féminisme, capitalisme et entrepreneuriat peuvent-ils faire bon ménage?

[00:00:00.240] – Tatiana St-Louis
Vous écoutez l’Ambition au Féminin Episode 163 et aujourd’hui on aborde des grosses questions en parlant de féminisme, de capitalisme et d’entrepreneuriat. Mon nom est Tatiana St-Louis et j’anime L’Ambition au Féminin, un podcast pour toutes les femmes pleines de vision, de talent et de drive qui désirent redéfinir le succès selon LEURS termes et LEURS conditions. Chaque semaine, j’explore, seule ou en présence d’invités, les thèmes entourant la réussite professionnelle et personnelle. Mindset, productivité, leadership, branding personnel… C’est LE rendez-vous pour réfléchir à la façon dont TU veux vivre ton plein potentiel et laisser ton empreinte dans le monde.

[00:00:48.010] – Tatiana St-Louis
Salut les ambitieuses ! J’espère que vous allez bien. Comme vous avez entendu dans l’introduction, on a un gros menu aujourd’hui, on va parler de grosses questions et naturellement, on ne va pas être capable d’aller au fond des choses. Je voulais préfacer cet épisode en disant que naturellement, cette question de l’entrepreneuriat dans un contexte capitaliste et comment intégrer une vision féministe là-dedans, c’est une question à laquelle je pense presque tous les jours. C’est ma question de recherche dans mon entreprise et naturellement, c’est ma vision qui est teintée par ma propre situation économique, mes propres privilèges, ma propre ignorance de certaines choses, mais aussi des réflexions que j’ai faites au fil du temps et qui ne sont pas finales. Donc je vous ai proposé cet épisode-là, non pas pour me positionner comme une experte sur le sujet ou comme une mentor, ou comme quelqu’un qui a quelque chose de particulièrement, je sais pas moi, plus solide à dire que quelqu’un d’autre, mais vraiment pour donner l’opportunité à ces questions-là de faire un chemin dans votre tête, si vous avez déjà des opinions, de pouvoir les confronter avec celles de quelqu’un d’autre…

[00:02:08.320] – Tatiana St-Louis
C’est toujours le fun de pouvoir approfondir notre propre réflexion en devenant le miroir de la réflexion d’autres personnes. Et aussi pour me permettre aussi de ne pas avoir peur de parler de ces choses-là en public. Parce que je pense que souvent ce qui arrive, c’est qu’on a l’impression qu’il faut avoir une certaine… Être arrivée à certaines conclusions ou une certaine rigidité d’esprit, ou du moins un ancrage, avant de parler de ces choses-là, alors que selon moi, la pensée se forme dans la conversation, dans le dialogue. Et ce que je vous propose ici, c’est une partie de ce dialogue. L’autre chose que je voulais dire par rapport à ça, c’est que, comme je pense que c’est un sujet qui est dense et je voulais rester quand même assez claire dans mes façons de présenter certaines choses, c’est un texte que j’avais écrit que je vous propose aujourd’hui, puis vous allez m’entendre le lire et peut- être parfois à certains moments je vais commenter certaines des parties si j’ai envie ou si je pense que c’est pertinent d’ajouter du fondement.

[00:03:31.450] – Tatiana St-Louis
Bon, je pense que j’ai assez fait une présentation de tout ça. Let’s go, on y va ! On n’a pas peur des grandes idées avec moi.

[00:03:44.350] – Tatiana St-Louis
Donc je commence en disant que vous êtes probablement très au courant si vous écoutez ce podcast, mais aussi si vous me lisez dans mon infolettre, vous avez remarqué que je parle souvent de système d’oppression. Je parle souvent de patriarcat, de richesse, de pouvoir. Mais il y a un mot que j’utilise presque jamais dans mes réflexions et ce mot-là, c’est le capitalisme. Une raison pourquoi je n’utilise pas souvent ce mot-là, c’est que j’évite le terme parce qu’en tant qu’ancienne étudiante en philosophie continentale, en tant qu’étudiante aussi des cultures slaves, j’en ai lu des compte-rendus de goulag, des reconstructions post bolchéviques, je me spécialisais dans la littérature russe et la littérature slave, j’ai une compréhension plutôt tendue des forces idéologiques qui soutiennent le capitalisme et ses contraires, ses pendants comme le communisme ou certains types de socialisme. Donc il y a ça d’un côté, puis d’un autre côté, une partie de moi n’en parle pas aussi parce que souvent j’ai été ouvertement critiquée pour mes positions, puis là je mets ça entre guillemets, parce que j’en reviens toujours pas que j’ai été étiquetée comme ça, « mes positions de droite » quand je réfléchissais à voix haute sur des sujets comme l’argent, le luxe, la richesse.

[00:05:14.440] – Tatiana St-Louis
Je trouve ça intéressant justement cette polarisation des opinions. Parce que je parlais à mes propres… À mes amis ou à des personnes qui sont proches de moi, puis jamais ils m’auraient mise sur le spectre politique à droite, même si je ne suis pas non plus une gauchiste, j’ai comme une réflexion ou un positionnement très fluide au niveau de cette polarisation politique et des fois ça peut être déroutant pour certaines personnes, mais bon, on s’embarque pas là-dedans parce qu’on s’entend que pour que quelqu’un m’appelle de droite, c’est parce que c’est quelque chose qui était particulièrement négatif à leurs yeux et pas quelque chose qu’on voudrait s’appeler. Mais bon, j’ai pris le commentaire et je fais le disclaimer ici parce que non, je ne suis pas pro-Trump et je ne suis pas non plus une conspirationniste de QAnon ou des choses comme ça. Bref, tout ça est une façon un peu compliquée de dire que je trouve que le capitalisme, c’est un sujet hyper complexe et pour lequel je déplore trop souvent les analyses superficielles qu’on en fait. Des analyses qui sont souvent incendiaires, qui utilisent le manteau de la soi disant moralité pour jeter de la haine gratuite à d’autres femmes entrepreneures, d’autres entrepreneurs.

[00:06:37.760] – Tatiana St-Louis
CEDI DIT, je me vois aussi comme une chercheure, une personne qui fait beaucoup de réflexions sur l’ambition chez les femmes. Et je réfléchis constamment à cette question qui est : est-ce que tout entrepreneuriat, parce qu’il est basé dans un système capitaliste, est fondamentalement abusif ? Et j’ai parlé à certaines personnes, donc j’ai fait une entrevue, notamment avec Jasmine Touitou sur… Ben, c’était pas sur ce sujet-là, mais elle, elle est ouvertement anti-capitaliste. Et moi je suis toujours intéressée à comprendre comment ça se décline. J’avais fait un panel, quand j’avais fait l’événement Money Power Respect, on en avait parlé aussi. J’aime avoir ces points de vue là parce que c’est dans ces points de vue là qu’on évolue. Et comme je l’ai dit aussi en début d’épisode, le fait que je vive en Occident, que j’ai la peau blanche, même si je suis pas de descendance caucasienne, je suis de descendance latina, il y a beaucoup d’intersections ici qui doivent être prises en considération quand on réfléchit à cette question-là et ça la rend compliquée.

[00:07:51.980] – Tatiana St-Louis
Mais est-ce que tout en entrepreneuriat, parce que basé dans un système capitaliste, est fondamentalement abusif ? Ça, c’est quand même une question qu’on peut tous se poser et de savoir comment est-ce qu’on veut aussi vivre à travers ce système-là, parce que, à moins qu’on soit dans une position qui peut être privilégiée ou non de sortir du système, bien souvent on va être dans des positions où on doit vivre avec, où on doit trouver des façons de rester intègres avec nos valeurs tout en évoluant ou tout en maintenant notre sécurité à travers tout ça. Donc, aujourd’hui, j’ai envie quand même de vous partager certaines de mes croyances, peut-être qu’elles vont nourrir vos réflexions et comme j’ai dit, j’y réfléchis encore, je n’ai pas de réponse complètement satisfaisante. Mais avant de commencer aussi, je veux juste m’assurer aussi que vous sachiez qu’il est encore possible de regarder le replay de ma masterclass gratuite qui s’appelle Apprendre à danser avec le chaos entrepreneurial sans surcharger ton système nerveux ou faire de ta croissance un événement traumatique.

[00:09:07.730] – Tatiana St-Louis
Si tu veux accéder à l’enregistrement, tout ce que tu as à faire, c’est de remplir le formulaire de candidature pour Autopoiesis. Ça va te prendre trois minutes maximum et avec le seul objectif d’apprendre à te connaître et voir si le travail que je propose à travers le programme est adapté à là où tu veux aller avec ton entreprise dans les prochaines années. Si tu penses que ça peut potentiellement t’intéresser, va voir la page Autopoiesis (aimetamarque.com/autopoiesis) donc AUTOPOIESIS et rempli le formulaire qui est tout en bas de la page. Et c’est pas plus compliqué que ça. Tu vas recevoir le lien du replay et tu vas pouvoir le regarder avant que ça expire. Alright ! Bon, maintenant, retournons au capitalisme et à l’entrepreneuriat. J’ai listé quatre raisons qui sont les plus grandes critiques, selon moi du discours anti-capitaliste actuel. Et la première raison, c’est que je pense que l’anticapitalisme existe que dans le framework du capitalisme. Et personnellement, je pense que si on est pour changer le monde, il faut qu’on outrepasse cette vision capitaliste / anticapitaliste du monde.

[00:10:24.410] – Tatiana St-Louis
Parce qu’une des caractéristiques du capitalisme c’est la capacité à absorber toute idéologie, tout mouvement, toute résistance et l’exploiter pour son propre avantage. Ici on peut penser à la profusion des t-shirts de Che Guevara ou à l’industrie de l’imagerie nostalgique de la Russie de Staline, l’ironie est la gazoline du capitalisme. Puis j’avais écrit un article sur le blog d’Aime Ta Marque qui datait de 2017 quand Pepsi avait fait une pub avec je pense Kendall Jenner ou avec Kylie… Bref, en relation à Black Lives Matter. Puis, premièrement, il y a mes réflexions là-dessus, mais aussi il y a comment ça a été reçu ce genre de publicité-là, qui est à la fois comme activiste mais vraiment bien ancrée dans le capitalisme. On peut penser aussi au film Barbie qui est un super bon exemple de cette manipulation- là. Donc l’anticapitalisme, de par son nom même, se définit comme un mouvement réactionnaire, « anti », qui existe uniquement comme négation de son grand frère « capitalisme ». Donc le premier existe dans le contexte du deuxième. Et même si la condamnation d’un système basé dans la violence et l’exploitation, le capitalisme, est une noble cause, fonder toute une idéologie socio-économique sur la négation de quelque chose qui est problématique, ça nous met dans une position de réactivité. Un genre de noir ou blanc dans lequel on n’offre pas d’alternative qui sort du cadre de la réflexion capitaliste.

[00:12:00.140] – Tatiana St-Louis
Puis selon moi, dans la réactivité, il n’y a pas de créativité et c’est probablement la plus grande critique que je fais du discours anticapitaliste, c’est son manque d’imagination. Donc ça, c’est la première raison. La deuxième raison : le discours anticapitaliste sous-tend trop souvent une position de privilège qui est ancrée dans la culpabilité occidentale. Puis ici, je vais parler plus spécifiquement de l’anticapitalisme qui démonise l’argent, la richesse, la propriété privée dans les mains de monsieur et madame tout le monde. Donc d’avoir de l’argent, d’avoir de la propriété selon ce mode d’anti capitalisme, ce serait… Tu sais, on ne fait pas la différence entre Elon Musk et moi, mettons. Donc le socialisme, le communisme et autres idéaux anticapitalistes sont intéressants à envisager quand t’as 19 ans, t’as envie d’essayer la vie de bohème avec tes deux colocs, dans ton appart mal décoré que ton papa comptable t’a déniché dans le quartier le plus hype de la ville, et là ça, c’est quelque chose que j’ai vécu moi-même, des personnes que j’ai réellement rencontrées.

[00:13:10.280] – Tatiana St-Louis
Mais c’est sûr que quand on ouvre nos horizons et on commence à parler à des personnes qui viennent de la Serbie, à des Haïtiens, à des Sud-Coréens, c’est sûr qu’on a un autre point de vue de tous les régimes qui sont proto communistes, puis de tout ce qui est ce discours autour de l’immoralité d’accumuler des biens au-delà de ce qui est socialement acceptable. Historiquement, ces personnes-là qui ont vécu dans ces modèles réactionnaires là, ils vont avoir une autre vision de cette démonisation de l’argent. Ça, c’est sûr que c’est extrêmement subjectif et c’est très fluide. Personnellement, moi, je suis la première génération d’une lignée qui a vécu dans l’extrême pauvreté. Ma mère venait d’un pays machiste qui a littéralement fait faillite, l’Argentine, et a grandi avec une mère divorcée, monoparentale qui a dû utiliser toute sa débrouillardise pour faire vivre ses trois enfants. Mon père, lui, il est allé dans les orphelinats catholiques dans la période noire de Duplessis dans les années 40, puis la précarité financière fait partie de notre roman intergénérationnel.

[00:14:26.100] – Tatiana St-Louis
Donc la recherche de sécurité, de stabilité, de richesse, c’est un mécanisme de survie et je pense qu’il y a vraiment… Il faut vraiment faire attention quand l’idée de se sentir coupable de nos privilèges nous donne une espèce de supériorité morale, de juger les personnes qui aspirent à tirer leur épingle d’un jeu qui est, on l’entend, biaisé, violent, exploitatif. Donc ce n’est pas ici une question de dire que le capitalisme est bon pour les gens, c’est juste une question de voir comment certaines personnes qui ont un discours anticapitaliste vont juger d’autres personnes pour jouer le jeu entre guillemets, alors que ces personnes-là sont en mode survie, donc de façon… Quand on réfléchit à un féminisme intersectionnel, c’est sûr qu’il faut prendre en compte ces différents contextes historiques et sociaux et culturels… Et personnels, naturellement. Raison numéro trois, je préfère combattre le patriarcat, l’extraction et l’entrepreneuriat oppressifs plutôt que la richesse. Bon, c’est sûr que j’aimerais ça vivre dans un monde où les ressources sont distribuées équitablement, mais dans notre obsession de l’hyper croissance, l’entitlement de l’Humain au-delà de la nature et notre déconnexion profonde à notre spiritualité ont créé un littéral déficit planétaire.

[00:15:53.580] – Tatiana St-Louis
En tant que citoyenne privilégié de l’Occident, je considère avoir une obligation morale de déconstruire ces modèles de concevoir le monde où l’humain est plus fort, meilleur, supérieur à la nature. Puis cette déconstruction, elle a lieu au sein de mon entreprise, mais aussi dans ma vie personnelle et mes schémas de pensée. C’est pourquoi l’entrepreneuriat, je le vois comme un geste féministe parce qu’il nous permet de changer les dynamiques qu’on entretient avec notre environnement, avec notre histoire et avec nos communautés. Idéalement pour le mieux. En passant, 2 livres qui m’ont beaucoup aidée à cheminer ces derniers temps sur cette idée-là, c’est True Wealth de l’économiste américaine Juliet B. Schor et Braiding Sweetgrass de la botaniste Potawatomi Robin Wall Kimmerer. Malgré ça, j’ai jamais eu le besoin de démoniser l’argent pour changer les paradigmes, parce que selon ma vision des choses, l’argent est une façon abstraite de participer à un acte d’échange, acte moralement neutre à la base de nos interactions humaines. Pour ce qui est de la richesse, elle est présente partout autour de nous.

[00:16:58.770] – Tatiana St-Louis
Suffit de la remarquer. On peut être garante de richesse momentanément et ensuite la redonner, la redistribuer et la faire circuler. Et c’est ça qui se passe quand les femmes accèdent à plus d’argent, elles la font circuler, c’est un fait documenté, je vais vous mettre un lien dans les notes si vous voulez aller regarder ça, mais selon les recherches sérieuses qui ont été faites sur le sujet, quand les femmes sont en position de richesse, elles font circuler le profit dans leur famille, leur communauté, etc. Bref, elles améliorent la situation de ceux et celles qui les entourent. Le problème n’est donc pas l’outil argent ou le résultat richesse, mais bien de bloquer la circulation comme il arrive justement avec les milliardaires ou les gouvernements qui sont en coalition les uns avec les autres et qui ne permettent pas à tous et à toutes d’accéder à ce flux monétaire. Et finalement, raison numéro quatre, je me méfie de toute injonction de moralité perfectionniste et ça, c’est plus une opinion qu’une raison. Je pense vraiment que beaucoup d’entrepreneurs anticapitalistes ont de la difficulté à réconcilier leurs désirs matériels et spirituels de bien vivre.

[00:18:14.250] – Tatiana St-Louis
Et cette tension, elle se manifeste par une position parfois moralisatrice qui me rappelle beaucoup trop l’oppression qu’on met sur les femmes, entre guillemets, d’être de bonnes petites filles parfaites. Puis bonnes petites filles parfaites… Des bonnes alliées, des bonnes anticapitalistes, des bonnes prodigueuses de soins, des… Tu sais, des bonnes femmes pleines de cœur, etc. Et quand je vois ce mal-être, j’ai de la misère à me dire que c’est la façon dont je verrais les gens, dont j’aimerais que les gens pensent et se sentent. Au contraire, ça fait plutôt me questionner à qui bénéficie de cette confusion, qui bénéficie de cette culpabilité. Puis 95 % du temps, la réponse est évidente : c’est le patriarcat qui bénéficie de cette honte qu’on met aussi sur les femmes de mieux faire et d’être genre assez dévotes pour montrer qu’elles, tu sais, qu’elles vont pas s’enrichir sur le dos des autres, etc. Parce que la honte, c’est l’arme préférée de l’oppression. Dès qu’elle se pointe le nez pour moi c’est un gros red flag qui se lève et quoi de mieux que de créer une honte profonde autour de l’argent chez les femmes pour pouvoir maintenir en place des systèmes de pouvoir actuels ?

[00:19:28.910] – Tatiana St-Louis
Hein ? Moi ce que je voudrais, c’est de voir plus de femmes en position de pouvoir. Parce qu’encore une fois, c’est documenté que quand les femmes prennent la tête d’entreprises, qu’elles accumulent de la richesse et qu’elles participent activement aux prises de décisions, les communautés qui les entourent en bénéficient davantage. Donc moi, ce que j’aimerais, c’est qu’on arrête de pointer du doigt celles qui se fraient un chemin vers ce leadership et qu’on les encourage plutôt à continuer à s’élever jusqu’à ce qu’elles soient en mesure de transformer elles aussi le tissu économique et social. Puis je préfère qu’on se rallie contre les Elon Musk, les Mark Zuckerberg et autres oligarques de ce monde et qu’on laisse tranquille la petite entrepreneure qui a réussi à faire son 200K, 300K, 500K cette année, qui a réussi à briser un cycle de pauvreté intergénérationnelle et profiter pour payer à sa famille un voyage de luxe à Bali. Ok. Faque naturellement, j’ai beaucoup plus à dire sur le sujet et avec beaucoup plus de nuances sûrement.

[00:20:23.930] – Tatiana St-Louis
Mais comme j’ai expliqué, c’est une réflexion qui est encore activement en cours. Et en fait, je suis tellement sérieuse dans cette réflexion-là que je veux continuer à l’adresser dans les prochaines années, à travers ma business mais aussi à travers ma vie personnelle. Naturellement, il n’y a pas de réponse facile, mais éventuellement, on n’a pas le choix que de se positionner. Et si on veut revenir au concret de l’entrepreneuriat, je pense que ce type de réflexion est d’autant plus crucial au moment où, collectivement, on commence à se questionner sérieusement sur nos modèles de créer et maintenir des entreprises oppressives. Donc si c’est le genre de question qui t’habite, un des piliers sur lesquels on va se pencher dans Autopoiesis dans les prochains mois, c’est comment établir notre propre éthique de profit. Parce qu’à la fin de la journée, ta façon d’entreprendre est un sujet qui va se décliner entre toi et ta conscience. Et le but, comme toujours dans nos entreprises, c’est d’en être consciente et intentionnelle, parce qu’une conscience ignorée peut rapidement se transformer en saboteur destructeur.

[00:21:25.340] – Tatiana St-Louis
Alright, n’oublie pas d’envoyer ta candidature pour Autopoiesis, la masterclass est encore disponible pour toi et ça serait plate quand même que tu passes à côté. À bientôt.

[00:21:37.190] – Tatiana St-Louis
Hey ! T’es encore là ? Ça veut dire que l’épisode t’a plu, c’est vraiment cool ça ! Est-ce que je peux te demander quelque chose maintenant ? Aide d’autres femmes comme toi à découvrir le podcast en déposant des étoiles d’appréciation pour l’Ambition au Féminin. Sur Apple Podcast, c’est facile : défile tout en bas de la page de l’émission où tu vois les avis et tapes sur le cinq étoiles pour faire exploser mon cœur de joie. Sur Spotify, c’est encore plus simple : navigue sur la page du balado et tape l’icône en étoile en bas de la description. Merci d’avance. Je t’apprécie beaucoup.

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à propos de l’auteureTatiana St-Louis

Adepte de littérature russe et collectionneuse de lunettes de designer, Tatiana a fondé Aime Ta Marque pour donner des outils aux femmes de carrière et entrepreneures pour mieux raconter leur histoire personnelle. Spécialiste des communications basée à Montréal, elle s'implique au sein de plusieurs communautés visant au développement professionnel des femmes.
Ep. 163 Féminisme, capitalisme et entrepreneuriat peuvent-ils faire bon ménage?

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